Écrit par William S. Osler, Usman M. Sheikh and James T. McClary
La Cour suprême du Canada a récemment rendu sa décision dans l’affaire McLean c. Colombie-Britannique (Commission des valeurs mobilières). 1
Il s’agit de la première affaire de la Cour à porter sur la coopération interprovinciale en matière de réglementation des valeurs mobilières depuis sa décision de 2011 dans le Renvoi sur les valeurs mobilières.2 Il s’agit également de la première décision rendue par la Cour depuis l’annonce, en septembre 2013, par les ministres des Finances du Canada, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, de créer un nouvel organisme national coopératif national de réglementation des valeurs mobilières. [voir la mise à jour de Bennett Jones sur le financement des entreprises, « Les gouvernements fédéral, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique annoncent un nouvel organisme de réglementation des valeurs mobilières , » septembre 2013]
La décision de la Cour souligne l’importance de la coopération interprovinciale dans l’application efficace et efficiente des lois sur les valeurs mobilières et a également des répercussions importantes sur le droit administratif en général.
Résumé des procédures
Le 8 septembre 2008, l’appelante, Patricia McLean, a conclu une entente de règlement avec la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario à l’égard d’une inconduite survenue en Ontario, en 2001 ou avant. Dans le cadre du règlement, la CVMO a émis une ordonnance interdisant à McLean de négocier des valeurs mobilières pendant cinq ans et lui interdisant d’agir à titre de dirigeante ou d’administratrice de tout émetteur ou inscrit déclarant en Ontario pendant dix ans. En 2010, la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique a rendu une ordonnance réciproque contre McLean qui était essentiellement identique à l’ordonnance de la CVMO.
Les ordonnances réciproques, aussi appelées procédures secondaires, permettent à un organisme de réglementation des valeurs mobilières, comme la BCSC, d’émettre des ordonnances de protection contre un intimé sur la base de conclusions d’inconduite liée aux valeurs mobilières par un organisme de réglementation des valeurs mobilières dans une autre province ou un autre territoire. Des dispositions d’ordre réciproque ont été adoptées par les 13 assemblées législatives provinciales et territoriales du Canada.
McLean a contesté l’ordonnance réciproque de la BCSC, soutenant que le délai de prescription de la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique interdisait toute ordonnance rendue plus de six ans après l’inconduite sous-jacente. Comme l’inconduite de McLean s’est produite entre 2000 et 2001, elle a soutenu que l’instance de la BCSC intentée contre elle en 2010 était prescrite et que la BCSC aurait dû entamer des procédures en 2007, avant la conclusion de l’entente de règlement de 2008 avec la CVMO. La BCSC a rejeté l’argument sans motifs et a rendu l’ordonnance réciproque.
La Cour d’appel de la Colombie-Britannique a examiné l’argument juridique de McLean selon la norme de contrôle de la décision correcte et a rejeté la contestation (en remitant l’affaire à la BCSC uniquement pour fournir de brèves raisons pour lesquelles l’ordonnance était dans l’intérêt public). M. McLean a interjeté appel de la décision de la Cour d’appel et, en juin 2012, la Cour suprême du Canada a accordé l’autorisation.
Décision de la Cour suprême du Canada
Un comité de sept membres de la Cour suprême du Canada a rejeté l’appel de McLean. Dans sa décision, la Cour a statué ce qui suit :
- La norme de contrôle de l’interprétation des délais de prescription par la BCSC dans la Securities Act de la Colombie-Britannique est le caractère raisonnable et non la décision correcte; et
- l’interprétation de la BCSC du délai de prescription dans la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique était raisonnable.
Répercussions de la décision
Le raisonnement de la Cour a des répercussions importantes sur la coopération interprovinciale en matière de réglementation des valeurs mobilières et le droit administratif.
Pour les organismes de réglementation des valeurs mobilières :
- La Cour a confirmé l’importance de la coopération interprovinciale. La décision de la Cour fait suite à la décision qu’elle a rendue dans le Renvoi relatif aux valeurs mobilières, qui a invalidé l’avant-projet de loi fédérale visant à créer le premier organisme national de réglementation des valeurs mobilières du Canada. Dans l’arrêt McLean, la Cour a affirmé l’importance de la coopération interprovinciale dans l’application des lois sur les valeurs mobilières au Canada, soulignant qu’une telle coopération est « indispensable » et que l’interprétation de la BCSC était raisonnable, car elle favorisait l’objectif manifeste du législateur d’améliorer cette coopération.
- La Cour a confirmé l’opportunité d’émettre des ordonnances réciproques, sans procédures parallèles et redondantes inefficaces. La Cour a fait remarquer que les arguments de McLean pourraient obliger chaque province ou territoire à entamer sa propre instance à l’égard d’une inconduite qui fait l’objet d’une enquête par une autre province ou un autre territoire, ce qui entraînerait un chevauchement des cas qui « encombrent le système juridique et surchargent les commissions des valeurs mobilières » et « imposent un lourd fardeau à la cible des procédures ; qui pourrait bien faire face à de multiples procédures dans tout le pays ».
- La Cour a reconnu les efforts déployés par la Colombie-Britannique pour améliorer la coopération interprovinciale en adoptant une loi sur les procédures secondaires. La Cour a examiné l’historique de la législation sur les procédures secondaires de la Colombie-Britannique, notant qu’elle découlait du protocole d’entente provincial-territorial concernant la réglementation des valeurs mobilières signé par toutes les provinces et tous les territoires (autres que l’Ontario) en 2004 et qu’il était spécifiquement conçu comme une « solution aux défis inhérents à la structure décentralisée de la réglementation des valeurs mobilières au Canada ». Ce faisant, la Cour semble avoir appuyé la poursuite de l’élaboration de solutions ponctuelles similaires à ces défis.
- La Cour A Fourni Des Directives Sur Ce Qui Est « Raisonnable » Lors De L’Émission D’OrdonnanceS RéciproqueS. La Cour a répondu à un certain nombre de préoccupations hypothétiques concernant l’interprétation du délai de prescription par la BCSC, y compris le fait qu’une série en cascade de procédures secondaires, s’appuyant les unes sur les autres, pourrait effectivement prolonger le délai de prescription à 74 ans. La Cour a reconnu qu’un organisme de réglementation agissant de la sorte dénaturerait probablement l’objet des dispositions relatives aux procédures secondaires. La Cour a toutefois noté qu’une telle ordonnance ferait l’objet d’un examen en appel selon la norme de la décision raisonnable et, sans trancher la question, a approuvé comme « bon sens » les propositions suivantes présentées par la BCSC relativement à l’émission d’ordonnances réciproques :
- La date à laquelle « commence le temps » aux fins du délai de prescription de la Colombie-Britannique pour les instances secondaires est la date à laquelle l’action pertinente s’est produite pour la première fois (c.-à-d.la date à laquelle une entente de règlement est conclue ou la date d’une déclaration de culpabilité, d’une décision judiciaire ou d’une ordonnance d’exécution);
- Une instance secondaire ne peut être intentée si la période de l’ordonnance initiale (c.-à-d. l’ordonnance rendue par la compétence principale) est déjà expirée; Et
- Une ordonnance réciproque doit être fondée sur une instance initiale dans la juridiction principale (plutôt que sur une autre ordonnance réciproque).
En ce qui concerne le droit administratif, et particulièrement sur la question de la norme de contrôle, la Cour a
- fourni des directives sur les « exceptions » à la présomption de déférence qui doivent s’appliquer à la décision d’un tribunal. McLean a soutenu que la décision de la BCSC devrait être révisée selon la norme de la décision correcte, en s’appuyant sur les quelques exceptions à la présomption de déférence qui s’appliquent par ailleurs à la décision d’un tribunal (voir la décision de la Cour dans Alberta Teachers' Association3). L’une de ces exceptions est lorsque la question soulève une question de droit qui est d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et qui ne relève pas de l’expertise spécialisée de l’arbitre. Poursuivant sa tendance à la déférence, la Cour a refusé d’appliquer l’exception, soulignant que les organismes de réglementation des valeurs mobilières peuvent en arriver à des interprétations différentes, mais raisonnables, de dispositions législatives semblables et que l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire d’interprétation fait partie de l’expertise d’un décideur administratif.
- La Cour a également fait preuve de retenue à l’égard des décisions rendues par un tribunal sans motif. La Cour a noté que, bien que la BCSC n’ait pas donné les raisons de son interprétation, elle « a implicitement décidé que l’instance n’était pas prescrite ». Bien que la Cour aurait préféré que la BCSC fournisse des motifs écrits, elle a fait remarquer qu’un fondement raisonnable de la décision ressortait « des arguments avancés par la [BCSC] » devant les tribunaux et qu’il n’y aurait rien à gagner à exiger de la BCSC qu’elle réexamine sa décision de renvoi. Une approche similaire a été adoptée récemment par la Cour dans l’affaire Agraira. 4
Usman M. Sheikh, avocat plaidant chez Bennett Jones LLP, a agi à titre de co-avocat de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario dans le cadre de l’appel.
Notes
- de 2013 CSC 67.
- Renvoi : Loi sur les valeurs mobilières (Can.) (2011 CSC 66).
- Alberta c Alberta Teachers' Association, 2011 CSC 61.
- Agraira c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2013 CSC 36 (voir le paragr. 58).
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