Il est bien connu que depuis 20 ans, Chevron Corp. est engagée dans un litige avec des résidents de la région de Lago Agrio en Équateur au sujet de dommages environnementaux et sanitaires présumés découlant des activités d’exploration pétrolière du prédécesseur de Chevron, Texaco. Le différend s’est déroulé en de nombreuses tranches tant devant les tribunaux fédéraux des États-Unis que devant les tribunaux de l’Équateur et a porté sur des questions de compétence, de forum conveniens, de validité d’un accord de règlement en vertu du droit des traités d’investissement et d’allégations de fraude. En fin de compte, en 2011, les plaignants ont obtenu un jugement de première instance équatorien pour environ 18 milliards de dollars, plus tard confirmé en appel. 1 Le 30 mai 2012, le demandeur a amené la partie au Canada.
Les demandeurs ont intenté une action devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario pour faire exécuter le jugement équatorien, non seulement contre Chevron Corp., mais aussi contre les actifs de Chevron Canada Limited, une filiale indirecte de septième niveau de Chevron Corp.2 Avant de se défendre, les parties à Chevron ont présenté des requêtes en annulation de la signification ou en suspension de la mesure d’exécution fondée sur le manque de compétence.
La Cour de l’Ontario a rendu sa décision le 1er mai 2013. 3 Elle a noté les circonstances inhabituelles de l’affaire, à savoir que les demandeurs ont cherché à faire exécuter le jugement équatorien en Ontario, où Chevron prétendait n’avoir aucun actif, mais n’avait jamais cherché à le faire valoir aux États-Unis, où Chevron a reconnu posséder des actifs. Malgré cela, la Cour a conclu qu’elle avait compétence simpliciter sur l’affaire.
Cependant, c’était la fin de la victoire des demandeurs. La Cour a ensuite conclu que, dans ce « cas très inhabituel », l’action d’exécution des demandeurs devrait être suspendue en fonction des conclusions:
En accordant la suspension, la Cour a fait remarquer que, même si elle n’hésiterait pas, et ne devrait pas, hésiter à exécuter un jugement simplement parce que l’instance serait difficile, les tribunaux de l’Ontario devraient être réticents à consacrer des ressources aux différends où il n’y avait pas d’actifs en Ontario pour se battre. Comme l’a résumé la Cour :
Chevron a déclaré publiquement : « Nous nous battrons jusqu’à ce que l’enfer gèle et nous nous battrons ensuite sur la glace. » Bien que l’Ontario bénéficie d’un approvisionnement abondant en glace pendant une partie de chaque année, l’Ontario n’est pas l’endroit idéal pour cette lutte... À mon avis, les parties devraient porter leur combat ailleurs dans une certaine juridiction où toute reconnaissance ultime du jugement équatorien aura un effet pratique. 4
Conformément à l’historique de l’affaire, l’avocat des demandeurs a déjà annoncé un appel. 5
Avec la mondialisation accrue des litiges, les questions d’application de la loi à l’échelle internationale sont susceptibles de devenir plus fréquentes. Bien que les faits de la présente affaire soient inhabituels, elle fournit des directives à toute partie étrangère impliquée dans d’éventuelles procédures d’exécution de jugement au Canada où le lien avec le Canada ou les actifs canadiens est loin d’être évident. L’analyse de la preuve d’exécution contre Chevron Canada intéressera les multinationales ayant des activités au Canada pour ce qui est de déterminer si elles seraient en mesure de démontrer la séparation requise des actifs et des opérations.
Il reste à voir si la décision de la Cour aura une incidence sur la courtoisie que d’autres tribunaux pourraient étendre aux tribunaux canadiens dans d’autres contextes.