En novembre, la Cour suprême du Canada a rendu deux décisions importantes sur la procédure dans les requêtes en matière de droits de la personne, qui devraient toutes deux en fin de compte aider les employeurs ou les intimés à se défendre contre les plaintes relatives aux droits de la personne.
Dans l’affaire Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (PG), 2011 CSC 53 (Mowat), la Cour suprême a rejeté l’argument selon lequel le Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) a le pouvoir d’adjuger des frais juridiques aux plaignants qui ont obtenu gain de cause. Dans l’affaire Colombie-Britannique (Workers' Compensation Board) c. Figliola, 2011 CSC 52 (Figliola), la majorité de la Cour suprême s’est fortement opposée aux plaignants en matière de droits de la personne qui tentaient de plaider leurs revendications devant de multiples instances avant de se retrouver devant un tribunal des droits de la personne.
Mowat : Dépens des demandes présentées au Tribunal des droits de la personne
La question en litige dans l’affaire Mowat était de savoir si le TCDP avait compétence pour adjuger aux demandeurs leurs frais juridiques. La Cour suprême a rejeté cette interprétation de la Loi canadienne sur les droits de la personne, ce qui signifie que les employeurs sous réglementation fédérale et les autres intimés ne peuvent pas être condamnés à indemniser les demandeurs pour leurs frais juridiques.
La Loi donne au TCDP le pouvoir d'« indemniser la victime pour [...] toutes les dépenses engagées par la victime en raison de l’acte discriminatoire ». La demanderesse en l’espèce, Donna Mowat, a allégué que son employeur, les Forces armées canadiennes, avait fait preuve de discrimination à son égard en tolérant le harcèlement sexuel. Le TCDP lui a accordé 4000 $ en dommages-intérêts généraux. Elle lui a également accordé 47 000 $ en frais juridiques à titre de « frais » en vertu de l’article 53.
La Cour fédérale a confirmé la décision du TCDP selon laquelle il avait le pouvoir d’adjuger des dépens. La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel au motif que le TCDP n’avait pas un tel pouvoir. La Cour suprême du Canada a confirmé à l’unanimité la décision de la Cour d’appel fédérale.
Premièrement, le libellé de la Loi laisse entendre que le législateur n’avait pas l’intention que le TCDP ait le pouvoir d’adjuger des dépens. L’article 53 utilise le terme dépenses lorsque les coûts sont le terme utilisé pour décrire les frais juridiques.
Deuxièmement, l’historique de la Loi et de la Commission canadienne des droits de la personne elle-même donne à penser que le TCDP n’a pas cette compétence. Les versions antérieures de la Loi qui n’ont pas été adoptées permettaient d’imputer des coûts. Le Conseil a adopté à maintes reprises la position selon laquelle le TCDP n’a pas le pouvoir d’attribuer des frais (et a recommandé que la loi soit modifiée pour permettre au TCDP d’attribuer des frais).
L’interprétation des dépenses adoptée par le TCDP et la Cour fédérale en l’espèce aurait créé un régime de dépens à sens unique au TCDP. Les demandeurs auraient eu droit à une indemnisation pour leurs frais juridiques, mais pas les employeurs ou les autres répondants. En interprétant la loi de façon étroite, la Cour suprême a maintenu des règles du jeu équitables pour les intimés sous réglementation fédérale, ce qui pourrait dissuader certains demandeurs de présenter des réclamations ténues ou augmenter les règlements précoces.
Figliola : Empêcher le forum shopping
À Figliola, les allégations de discrimination des plaignants ont été rejetées par la Commission des accidents du travail de la Colombie-Britannique. Les plaignants ont soulevé les mêmes allégations dans une nouvelle plainte au Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique. Les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada ont rejeté cette tentative de « recherche du for le plus avantageux » et ont rejeté l’instance devant le Tribunal. Pour les employeurs et les autres intimés qui font face à une plainte en matière de droits de la personne, même si des questions de discrimination ont été soulevées dans une autre instance (comme un arbitrage de travail ou dans une demande d’indemnisation des accidents du travail), la décision de la majorité devrait faciliter le rejet de la plainte au tribunal des droits de la personne. Mais la forte dissidence et une décision récente de l’Ontario peuvent signifier que cette question est réexciente.
À l’instar des lois provinciales sur les droits de la personne en Alberta et en Ontario, le Code des droits de la personne de la Colombie-Britannique accorde au Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique le pouvoir de rejeter les plaintes qui ont « été traitées de façon appropriée dans une autre instance » (alinéa 27(1)f)). À Figliola, les plaignants souffraient tous de douleurs chroniques. La Workers' Compensation Board de la Colombie-Britannique leur a accordé une indemnité fixe en vertu de la politique de la Commission sur la douleur chronique. Les plaignants ont interjeté appel de la décision, faisant valoir que les indemnités fixes en vertu de la Politique étaient discriminatoires en vertu du Code des droits de la personne de la Colombie-Britannique. L’agent de révision a conclu qu’il avait le pouvoir d’appliquer le Code et a conclu que la Politique n’était pas discriminatoire. Les plaignants auraient pu réviser judiciairement la décision de l’agent de révision. Ils ont plutôt demandé au Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique de rendre une ordonnance selon laquelle la Politique sur la douleur chronique contrevenait au Code des droits de la personne.
La Commission des accidents du travail a demandé une ordonnance rejetant les demandes des plaignants au motif qu’elles avaient été traitées de façon appropriée. Le Tribunal a rejeté la demande de la Commission. Dans le cas d’un contrôle judiciaire, la décision du Tribunal a été annulée. La Cour d’appel a toutefois rétabli la décision du Tribunal.
Les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada ont accueilli l’appel et rejeté la demande des plaignants. Pour décider si une plainte a été « traitée de façon appropriée », la Cour suprême a ordonné au Tribunal d’examiner :
- s’il y avait compétence concurrente pour trancher les questions en litige,
- Si la question juridique déjà tranchée était essentiellement la même que celle dont on se plaint au Tribunal, et
- S’il y avait une possibilité pour les plaignants de connaître l’affaire à rencontrer et d’avoir la possibilité de la rencontrer, peu importe dans quelle mesure le processus précédent reflétait celui que le Tribunal préfère ou utilise lui-même.
Les tribunaux sont en droit de présumer que, sous réserve d’un appel ou d’un contrôle judiciaire, leur décision est définitive et sera traitée comme telle par d’autres organismes administratifs. En l’espèce, la Cour suprême a conclu que les plaignants tentaient de « magasiner sur le forum » ou de « plaider à nouveau » dans un autre forum « à la recherche d’un résultat plus favorable ». Le Tribunal s’est porté complice de cet appel accessoire en omettant de rejeter les plaintes et sa décision était manifestement déraisonnable.
Les juges dissidents ont accepté le résultat final, mais auraient renvoyé les plaintes au Tribunal pour réexamen. De plus, les juges dissidents ont conclu que l’analyse de la majorité était trop étroite : à leur avis, le Tribunal devrait tenir compte d’autres facteurs, comme les circonstances de l’espèce, le mandat du Tribunal et de l’autre organisme administratif et la question de savoir si une ordonnance de rejet constituerait une injustice.
Fait intéressant, la Cour divisionnaire de l’Ontario a traité de la même question seulement une semaine avant la décision de la Cour suprême. Dans l’affaire College of Nurses v. Trozzi, 2011 ONSC 4614, la Cour divisionnaire a statué que le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario aurait dû rejeter la plainte du demandeur parce que la Commission d’appel et de révision des professions de la santé (HPARB) avait déjà décidé si le demandeur avait fait l’objet de discrimination. Les motifs de la Cour divisionnaire se concentrent sur le mandat de la HPARB, qui est l’un des facteurs que la dissidence dans l’affaire Figliola a identifiés. Bien que le raisonnement de la majorité dans l’arrêt Figliola lie en fin de compte les tribunaux de l’ensemble du Canada, l’adoption par inadvertance par la Cour divisionnaire de l’opinion dissidente peut indiquer que cette question n’est pas définitivement résolue.
Ces décisions suggèrent que les litiges multiples ne seront pas tolérés, ce qui signifie que les employeurs et les autres intimés qui font face à des plaintes en matière de droits de la personne dans de multiples forums tels que les arbitrages du travail, les commissions des accidents du travail ou d’autres tribunaux, pourront probablement demander le rejet des plaintes à un tribunal des droits de la personne. Mais, compte tenu de la forte dissidence et de l’approche similaire adoptée par la Cour divisionnaire, il pourrait y avoir plus de litiges sur cette question, du moins en Ontario.
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