Écrit par John Gilmore, David Cassin and Joseph Koshan
La Cour suprême du Canada a récemment confirmé que, sous réserve de l’intention contraire expresse du législateur, lorsque la législation du travail prévoit le règlement définitif des différends découlant d’une convention collective, la compétence de l’arbitre du travail habilité par cette loi est exclusive.
La décision de la Cour dans l’affaire Northern Regional Health Authority v Horrocks, 2021 CSC 42 [Horrocks] apporte plus de clarté et confirme la jurisprudence antérieure de la Cour sur les différends d’exclusivité et de compétence entre les arbitres du travail et les tribunaux statutaires.
Contexte : Décisions contradictoires et confusion qui s’ensuit
Le différend sous-jacent à la décision Horrocks est survenu après que Linda Horrocks, une employée syndiquée, a allégué que son employeur, la Northern Regional Health Authority (NRHA), n’avait pas pris de mesures d’adaptation adéquates pour son invalidité lorsqu’elle l’avait congédiée pour avoir violé une entente de la dernière chance. Après son congédiement, Mme Horrocks a déposé une plainte devant un arbitre de la Commission des droits de la personne du Manitoba, alléguant que son congédiement violait ses droits en vertu du Code des droits de la personne du Manitoba.
La NRHA a contesté la compétence de la Commission pour entendre la plainte, faisant valoir que la décision antérieure de la Cour dans
La décision de la Commission sur la compétence a été annulée dans le cadre d’un contrôle judiciaire, où la Cour a conclu que le caractère essentiel du différend était de savoir si la NRHA avait un motif valable de mettre fin à l’emploi de Horrocks, qui, bien qu’il comprenait une violation alléguée des droits de la personne, relevait de la compétence exclusive de l’arbitre du travail.
La Cour d’appel a souscrit à la conclusion de la Cour sur le contrôle judiciaire selon laquelle les différends concernant le congédiement d’un employé syndiqué (y compris les violations alléguées des droits de la personne) relèvent de la compétence exclusive d’un arbitre du travail, mais a conclu que la Commission avait compétence pour les raisons suivantes :
- Horrocks a choisi de ne pas déposer de grief contre son congédiement et de poursuivre uniquement la plainte présumée en matière de droits de la personne;
- l’allégation de discrimination soulevait des questions qui « transcendaient » le contexte de l’emploi; et
- comme le syndicat n’était « pas intéressé » à poursuivre l’arbitrage sur les allégations de droits de la personne, Horrocks n’avait pas d’autre forum pour poursuivre sa plainte si un arbitre du travail détenait la compétence exclusive.
La décision de la Cour suprême : analyse en deux étapes et compétence exclusive
La majorité des sept membres de la Cour suprême (le juge Karakatsanis était le seul juge dissident) a accueilli l’appel de la NRHA et annulé le jugement de la Cour d’appel. La Cour a conclu que la Commission n’avait pas compétence à l’égard de la plainte, car la compétence instituait exclusivement à l’arbitre du travail, conformément à la convention collective et à la Loi sur les relations de travail au Manitoba.
Pour en arriver à sa conclusion, la Cour a réitéré et affiné l’analyse en deux étapes précédemment énoncée dans sa décision dans
PREMIÈRE ÉTAPE : La législation pertinente doit d’abord être examinée pour déterminer si elle accorde à l’arbitre une compétence exclusive et, dans l’affirmative, sur ce qui compte. Lorsque la loi comprend une clause de règlement obligatoire des différends, un arbitre a la compétence exclusive de trancher tous les différends découlant de la convention collective, sous réserve de l’intention claire du législateur à l’effet contraire.
DEUXIÈME ÉTAPE : Si la loi accorde à l’arbitre du travail une compétence exclusive, il faut alors déterminer si le différend relève de la compétence. Cette compétence s’étendra à tous les différends qui découlent, dans leur caractère essentiel, de l’interprétation, de l’application ou de la violation alléguée de la convention collective. L’examen pertinent porte sur les faits allégués et non sur la qualification juridique de l’affaire.
Dans l’affaire Horrocks, la convention collective et la Loi sur les relations de travail ont rendu obligatoire l’arbitrage de « toutes les différences » liées à la « signification, à l’application ou à la violation alléguée » de la convention collective. Comme la législation du travail prévoyait le règlement définitif des différends découlant d’une convention collective, la compétence de l’arbitre du travail habilité par la législation est exclusive. La Cour a reconnu que des tribunaux législatifs concurrents peuvent s’entêlés à la sphère de l’exclusivité, mais seulement lorsque l’intention du législateur est clairement exprimée. La Cour n’a conclu à aucune intention de ce genre dans le Code des droits de la personne.
En examinant le caractère essentiel de la plainte de Horrocks devant la Commission, la Cour n’était pas d’accord avec la qualification de la plainte par la Commission comme découlant d’une « violation alléguée des droits de la personne [de Horrocks] ». Au lieu de cela, la Cour a conclu qu’essentiellement la plainte de Horrocks découlait essentiellement de l’exercice par la NRHA de ses droits en vertu de ce qui suit : et de sa violation alléguée de la convention collective. Bien que la Cour ait reconnu que la plainte portait sur certains des droits prévus par la loi de Horrocks, ces droits étaient « trop étroitement liés aux droits négociés collectivement pour être raisonnablement séparés » et, à ce titre, sa demande appartient uniquement à l’arbitre de trancher.
Points à retenir
Bien que l’arrêt Horrocks concerne expressément la Loi sur les relations de travail du Manitoba, le libellé en cause en vertu de la loi est presque identique à celui du paragraphe 48(1) de la Loi sur les relations de travail de l’Ontario et est essentiellement similaire à celui d’autres lois provinciales sur les relations de travail. Par conséquent, la décision s’appliquera largement aux employeurs de main-d’œuvre syndiquée en Ontario, et peut-être dans l’ensemble du pays.
Toutefois, la Cour a pris soin de noter que certains régimes législatifs au Canada peuvent révéler une intention législative selon laquelle les tribunaux des droits de la personne ont une compétence concurrente à l’égard des plaintes découlant d’une convention collective. La Cour a expressément mentionné que les lois fédérales et celles de la Colombie-Britannique en matière de droits de la personne habilitent les décideurs à reporter l’examen des plaintes qui peuvent être traitées dans le cadre d’une procédure de règlement des griefs, ce qui, selon la Cour, implique nécessairement que ces décideurs ont une compétence concurrente à l’égard des différends qui sont assujettis à la procédure de règlement des griefs. Par conséquent, les employeurs dans les milieux de travail syndiqués en Colombie-Britannique, ou dans les industries sous réglementation fédérale, peuvent ne pas être en mesure de se fier à la décision Horrocks lorsqu’un travailleur porte une plainte en matière de droits de la personne.
La Cour n’a pas mentionné spécifiquement le régime législatif de l’Alberta dans l’arrêt Horrocks. Toutefois, le paragraphe 22(1.1) de la Human Rights Act de l’Alberta habilite le directeur de la Commission des droits de la personne de l’Alberta à refuser d’accepter une plainte qui pourrait ou devrait être traitée dans une autre instance ou en vertu d’une autre loi. De plus, l’article 67.1 du Code des relations de travail (Alberta) permet à toute partie à une instance devant la Commission des droits de la personne de l’Alberta ou d’un tribunal des droits de la personne de demander à l’Alberta Labour Relations Board de poursuivre cette instance. Ensemble, ces dispositions peuvent donner à penser que les décideurs en vertu de la Human Rights Act de l’Alberta ont une compétence concurrente pour entendre les différends découlant des conventions collectives, à l’instar des commentaires de la Cour sur les lois fédérales et de la Colombie-Britannique.
L’arrêt Horrocks est une décision bienvenue pour les employeurs de main-d’œuvre syndiquée, car elle fournit une clarté et une confirmation supplémentaires de la compétence exclusive d’un arbitre, sous réserve de l’intention claire du législateur à l’effet contraire, et assure l’uniformité de l’approche, de l’arbitrage et de la rapidité des plaintes dans la procédure de règlement des griefs. La décision protège également contre le risque d’une multiplicité de procédures, limitant les différends en matière de droits de la personne découlant d’une convention collective au processus d’arbitrage du travail – un processus qui permet aux employeurs d’avoir leur mot à dire dans la sélection d’un arbitre ayant une expérience et des connaissances spécifiques. Toutefois, comme nous l’avons vu plus haut, la question de savoir si la compétence des arbitres en matière de travail est vraiment exclusive dépendra du régime législatif particulier qui s’applique à la relation d’emploi particulière, et les propriétaires d’entreprise qui font face à des plaintes relatives aux droits de la personne survenant dans des milieux de travail syndiqués seraient avisés de demander un avis juridique pour déterminer l’effet du régime législatif en cause.
Bien qu’il s’agit d’une décision utile pour les employeurs, les syndicats devraient prendre garde que l’effet de la décision peut entraîner une augmentation des plaintes relatives à l’obligation de représentation équitable lorsque les syndicats décident de ne pas présenter de griefs en matière de droits de la personne.
Si vous avez des questions sur l’effet de cette décision et sur la façon dont elle peut s’appliquer à votre entreprise, veuillez communiquer avec le groupe Bennett Jones Employment Services pour en discuter.
Traduction alimentée par l’IA.
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