Les Autochtones Des États-Unis Peuvent Détenir Des Droits Ancestraux Au Canada

03 mai 2021

Écrit par David Bursey, Radha Curpen, Sharon Singh and Deirdre Sheehan

Le 23 avril 2021, la Cour suprême du Canada (CSC) a rendu sa décision dans R. c. Desautel, 2021 CSC 17, qui a confirmé les décisions des tribunaux inférieurs d’acquitter Richard Desautel des accusations portées contre richard Desautel en vertu de la Loi sur la faune. La CSC a confirmé son droit ancestral de chasser dans la région des lacs Arrow, en Colombie-Britannique, même s’il est résident et citoyen des États-Unis.

Cette affaire a soulevé de nouvelles questions quant à la portée territoriale de l’expression « peuples autochtones du Canada » à l’article 35 de la Constitution Act, 1982. La Cour a décidé que les droits ancestraux prévus à l’article 35 peuvent s’étendre aux peuples autochtones qui ne sont pas des citoyens ou des résidents du Canada, même si le groupe autochtone successeur d’aujourd’hui qui détient ces droits n’occupe plus la même zone géographique où le collectif historique antérieur au contact avec les Européens exerçait ces droits.

Compte tenu de la longue frontière que le Canada partage avec les États-Unis, la présente affaire a des répercussions sur l’exercice de divers droits ancestraux le long de cette frontière et sur des questions de procédure connexes concernant l’obligation de la Couronne de consulter.

Contexte de l’appel

En octobre 2010, M. Desautel a abattu un wapiti femelle dans la région d’Arrow Lakes, en Colombie-Britannique. Il a été accusé en vertu de la Wildlife Act de la Colombie-Britannique d’avoir chassé sans permis et d’avoir chassé du gros gibier alors qu’il n’était pas résident de la Colombie-Britannique.

M. Desautel est membre de la tribu des Lacs des tribus confédérées de Colville dans l’État de Washington, que le juge de première instance a jugée être un groupe successeur du peuple Sinixt. Il n’est ni citoyen ni résident du Canada. M. Desautel a affirmé qu’il exerçait son droit ancestral de chasser à des fins cérémoniales sur le territoire traditionnel de ses ancêtres Sinixt. Il s’agissait d’une cause type sur ce droit.

Au niveau du tribunal de première instance, le juge a appliqué le critère de reconnaissance des droits ancestraux énoncé dans la CSC Van der Peet, et a tiré les conclusions de fait suivantes :

  • la tribu des Lacs est un groupe qui a succédé au peuple Sinixt qui vivait en Colombie-Britannique au moment du contact;
  • les Sinixt ne se sont pas volontairement déplacés vers leur territoire traditionnel du sud ou n’ont pas l’intention d’abandonner leur revendication dans le nord;
  • en 1956, aucun membre de Sinixt ne vivait au Canada et le Canada a déclaré la bande des terres Arrow éteinte et leurs terres de réserve ont été retournées à la Couronne provinciale;
  • malgré un intervalle entre 1930 et 2010 où les peuples des lacs semblaient cesser de chasser ou de se déplacer au nord du 49e parallèle, la chaîne de continuité n’avait pas été rompue; et
  • en tant que groupe successeur du peuple Sinixt vivant en Colombie-Britannique au moment du contact, la tribu des Lacs est une communauté moderne qui détient des droits et qui est capable de détenir un droit ancestral.

Le juge de première instance a conclu que M. Desautel avait établi son droit ancestral et l’a acquitté des accusations. L’acquittement de M. Desautel a été confirmé par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique et, en fin de compte, par la CSC, pour les raisons que nous allons maintenant expliquer.

Question constitutionnelle dont la CSC est saisie

L'SCC a examiné si M. Desautel, étant membre de la tribu des lacs des tribus confédérées de la réserve de Colville dans l’État de Washington, aux États-Unis, pouvait faire valoir un droit ancestral en vertu de l’article 35 pour faire valoir que la Wildlife Act de la Colombie-Britannique ne s’appliquait pas à lui.

Paragraphe 35(1) et « Peuples autochtones du Canada »

Pour répondre à la question constitutionnelle, la Cour s’est d’abord penchée sur la question de savoir si un peuple autochtone situé à l’extérieur du Canada peut faire valoir des droits protégés en vertu du paragraphe 35(1) de la Constitution Act, 1982.

La CSC a distingué la question de savoir si un groupe est un peuple autochtone du Canada de la question de savoir si le groupe a un droit ancestral, bien que la preuve puisse être pertinente pour l’analyse des deux questions.

La CSC s’est d’abord pencher sur la question préliminaire de savoir si le groupe est un peuple autochtone du Canada, mais a fait remarquer que, dans la plupart des cas, cette question ne se pose pas comme elle l’a fait en l’espèce. Pour répondre à la question, la CSC a expliqué les deux objectifs du paragraphe 35(1), comme suit :

  • reconnaître l’occupation antérieure du Canada par des sociétés organisées et autonomes; et
  • pour concilier leur existence moderne avec l’affirmation de la souveraineté de la Couronne sur eux.

Suivant cette approche télévisée de l’interprétation du paragraphe 35(1), le SCC a conclu qu’il est clair que les « peuples autochtones du Canada » doivent signifier les successeurs modernes des sociétés autochtones qui occupaient le territoire canadien au moment du contact avec les Européens. Ainsi, les groupes dont les membres ne sont ni citoyens ni résidents du Canada peuvent être des peuples autochtones du Canada. Le SCC a précisé que les deux objets du paragraphe 35(1) sous-tendent les deux critères suivants : 1) les droits ancestraux énoncés dans l’arrêt Van der Peet; et 2) titre ancestral énoncé dans Delgamuukw c. Colombie-Britannique. En se fondant sur cette « structure doctrinale » des droits ancestraux, la majorité de la CSC a conclu que les groupes autochtones à l’extérieur du Canada peuvent être considérés comme des peuples autochtones du Canada s’ils sont les successeurs modernes des sociétés autochtones qui occupaient le territoire canadien au moment du contact avec les Européens. La CSC a averti que ce critère devrait être modifié pour les Métis parce que les communautés métisses sont apparues après des contacts entre d’autres peuples autochtones et des Européens. Toutefois, la CSC a laissé cette question à résoudre dans une affaire future.

Le SCC a également examiné la question du déplacement involontaire du Sinixt, et comment la réconciliation doit refléter cette circonstance.

Le SCC a insisté sur un point fondamental selon lequel le paragraphe 35(1) ne créait pas de droits ancestraux, mais accordait une protection constitutionnelle aux droits ancestraux existants. Le paragraphe 35(1) n’est pas la source des droits ancestraux.

Pour ce qui est de la deuxième question, le SCC a appliqué le critère énoncé dans l’arrêt Van der Peet, qui est le même pour les groupes à l’extérieur du Canada que pour les groupes au Canada.

La CSC a conclu qu’une chaîne ininterrompue de continuité dans l’exercice d’un droit n’est pas nécessaire et que l’exercice du droit peut expirer pendant un certain temps. La CSC a déclaré que l’évaluation de la continuité est un exercice très spécifique aux faits et « généralement du domaine du juge de première instance ».

Appliquant les faits établis par le juge de première instance au critère de l’arrêt Van der Peet, la CSC a conclu que M. Desautel a le droit ancestral, en vertu du paragraphe 35(1), de chasser sur le territoire ancestral des Sinixt en Colombie-Britannique.

L’incompatibilité souveraine — Les droits à la mobilité

La CSC a refusé de se prononcer sur la question de savoir si le droit ancestral de chasser en Colombie-Britannique comprenait le droit de traverser la frontière canado-américaine et comment un tel droit se concilie avec la souveraineté canadienne sur ses frontières.

Le SCC a fait remarquer que le droit à la mobilité, s’il existe, serait accessoire dans ce cas. La question de l’incompatibilité de ce droit ne s’est pas posée en l’espèce parce que M. Desautel ne s’est pas vu refuser l’entrée au Canada.

Conséquences de la décision—L’obligation de consulter—La violation

Après avoir répondu à la question constitutionnelle, la CSC a également examiné plusieurs conséquences de la décision en réponse à plusieurs questions soulevées par la Couronne et les procureurs généraux. En général, le SCC a expliqué que même si une communauté autochtone à l’extérieur du Canada peut faire valoir et détenir des droits ancestraux au Canada, ces droits peuvent différer des droits des communautés au Canada.

Obligation de consulter

Le SCC a fait remarquer que l’obligation de consulter peut fonctionner différemment pour les groupes autochtones à l’extérieur du Canada qui font valoir ou détiennent des droits au Canada. La différence se rapporte à la connaissance réelle ou implicite par la Couronne du droit revendiqué. En l’état d’une interaction historique avec le groupe, il se peut que la Couronne n’ait aucun fondement pour connaître la revendication de droits.

La CSC a expliqué qu’il n’y a « aucune obligation autonome pour la Couronne de rechercher les groupes autochtones, y compris ceux à l’extérieur du Canada, en l’absence d’une connaissance réelle ou constructive d’une incidence potentielle sur leurs droits ». Il incombe au groupe qui revendique un droit d’aviser la Couronne et, en l’absence de connaissance d’un droit revendiqué, la Couronne est libre d’agir. Si la Couronne est avisée, elle doit alors déterminer si son obligation de consulter prend naissance et comment s’acquitter de toute obligation.

Justification

La CSC a déclaré que le fait qu’un groupe autochtone se trouve à l’extérieur du Canada est un facteur pertinent qui peut être pris en compte dans une analyse de justification liée au pouvoir du gouvernement de porter atteinte aux droits ancestraux.

Titre aborigène

La CSC a déclaré que « bien que le critère du titre ancestral ait la même structure de base que celui des autres droits ancestraux, il présente également d’importantes différences ». La CSC a fait remarquer que : 1) la date historique pour la preuve du titre ancestral est la date de la souveraineté de la Couronne, et non la date de contact; et 2) le titre aborigène exige la preuve de l’occupation exclusive du territoire, sans qu’il soit nécessaire de démontrer que cette profession faisait partie intégrante de la culture.

Conséquences

Cette décision pourrait avoir de profondes répercussions sur la Couronne, l’industrie et les groupes autochtones. Il souligne l’importance de tenir compte du territoire de contact pré-européen des groupes autochtones et de la relation avec le modèle actuel d’établissement. La frontière souveraine après le contact avec les autorités ne limite peut-être pas la portée géographique des droits ancestraux.

La Couronne a l’obligation de consulter les groupes autochtones lorsque la conduite de la Couronne est susceptible d’avoir une incidence sur les droits ancestraux, prouvés ou revendiqués. Étant donné que cette décision établit que les droits ancestraux peuvent s’étendre aux sociétés de personnes collectives modernes qui résident aux États-Unis, l’obligation de la Couronne de consulter et d’accommoder peut également s’étendre à ces groupes. Bien que la décision explique que l’obligation peut être appliquée différemment à ces groupes, les implications procédurales et de fond des consultations transfrontalières seraient complexes.

Maintenant que la porte est ouverte aux groupes autochtones résidant aux États-Unis pour faire valoir leurs droits au Canada, la portée de l’obligation de consulter et d’accommoder de l’autre côté de la frontière demeure un domaine qui sera précisé dans les affaires futures.

Auteur(e)s

David Bursey
604.891.5128
burseyd@bennettjones.com



Traduction alimentée par l’IA.

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