Négligence grave: à quel point doit-il être mauvais?

20 juillet 2010

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Écrit par April D. Grosse and Michael P. Theroux

À la suite de l’explosion de Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique, le terme juridique de négligence grave a pris de l’importance dans les médias grand public. Les acteurs de l’énergie des deux côtés de la frontière et du monde entier en discutent certainement.

La plupart des ententes canadiennes prévoyant l’exploitation d’actifs pétroliers et gaziers (autres que l’exploitation à contrat) exigent que tous les participants au projet contribuent aux coûts et aux responsabilités engagés par l’exploitant, sauf dans les cas de négligence grave. Cet article fournit aux lecteurs un examen du droit de la négligence grave au Canada, avec un accent particulier sur son application dans le secteur de l’énergie.

Négligence grave en common law

Il est difficile de savoir exactement quelle conduite constituera une négligence grave dans une situation particulière. Cela découle en partie de la nature intrinsèquement fondée sur les faits de l’exercice et en partie de l’absence d’un délit indépendant de négligence grave en common law. La difficulté est aggravée dans le contexte du pétrole et du gaz parce que l’utilisation initiale du terme « négligence grave » au Canada se trouvait dans des lois traitant de questions comme la responsabilité des véhicules automobiles, la responsabilité municipale ou les sauveteurs du bon samaritain. Les faits et conclusions spécifiques dans les cas décidés par référence à ces lois peuvent être difficiles à traduire à l’exploitation d’un puits ou à la gestion d’une usine à gaz. Cependant, les juges ont établi des principes généraux de négligence grave qui s’appliqueront aux différends de l’industrie de l’énergie. Voici quelques-unes des définitions judiciaires canadiennes couramment citées de la négligence grave :

Il y a eu quelques cas suggérant qu’une partie ne fera l’objet d’une négligence grave que s’il y a des actes répréhensibles conscients ou une indifférence consciente aux conséquences. Bien que ces deux facteurs soient des indicateurs convaincants de la négligence grave, l’opinion prédominante actuelle en droit canadien est que la négligence grave n’exige pas d’élément d’intention mentale. Bien entendu, cela est toujours assujetti à une définition légale ou contractuelle de la négligence grave qui impose expressément ou implicitement un élément moral (voir ci-dessous) ou autrement au contexte dans lequel l’expression est utilisée.

La Cour peut tenir compte de facteurs tels que la probabilité d’un préjudice et l’ampleur du préjudice potentiel lorsqu’elle évalue si la conduite est grossièrement négligente. Il est possible qu’une conclusion de négligence grave soit fondée sur une série d’actes ou d’omissions d’agir qui, à eux seuls, ne constitueraient pas une négligence grave.

Négligence grave liée aux opérations pétrolières et gazières

Compte tenu de la prévalence des contrats de l’industrie dans lesquels la responsabilité ou les limites de responsabilité dépendent de la négligence grave, il y a étonnamment peu de cas signalés traitant du sujet dans le contexte des opérations pétrolières et gazières.

Dans l’affaire United Canso Oil & Gas Ltd. c. Wash Northern, Inc. (Alberta Q.B.), deux exploitants successifs d’une usine de gaz ont entrepris la comptabilité de la coentreprise, mais n’ont pas inclus de comptabilité des intérêts reportés ou des paiements de production. Cela a eu pour résultat que les revenus qui auraient dû aller à une partie emportée ont été distribués aux parties non portées. L’accord d’exploitation conjointe ne prévoyait la gestion de la responsabilité de l’exploitant qu’en cas de négligence grave ou d’inconduite volontaire. En concluant à la négligence grave, la Cour a mis l’accent sur le fait que lorsque chacun de ces exploitants gestionnaires a pris la relève, ils savaient que la partie importatrice prétendait que le paiement avait été effectué et qu’il y avait un différend comptable non résolu. Bien que les opérateurs de gestion aient fait des efforts pour résoudre le différend, lorsque cela ne s’est pas produit, ils ont simplement continué comme si le paiement n’avait pas été atteint. La Cour a déclaré: « Les questions en suspens ont été soit ignorées, soit un risque calculé a été pris que la comptabilité de Husky [l’ancien exploitant] était correcte ou que le demandeur ne poursuivrait pas les questions. J’estime qu’il s’agit d’une négligence grave, telle que définie comme un écart très marqué par rapport aux normes selon lesquelles les sociétés raisonnables et compétentes dans une position similaire à celle d’Asamera et de Lasmer en tant qu’opérateurs gérants responsables de coentreprises ou de comptabilité devraient habituellement se gouverner elles-mêmes. Il s’agissait d’une indifférence consciente à l’égard des droits ou du bien-être de United Canso et de ses prédécesseurs. La Cour a ajouté que les exploitants auraient dû demander des directives à la Cour sur les questions en suspens plutôt que d’insister comme si elles n’existaient pas.

Dans l’affaire Adeco Exploration Company Ltd. v. Hunt Oil Company of Canada Ltd., la Cour d’appel de l’Alberta a conclu qu’un exploitant en vertu d’une entente d’exploitation conjointe régie par la procédure d’exploitation de 1990 de CAPL avait fait preuve d’une négligence grave en omettant de renouveler les baux de l’État pour deux parcelles non productrices. L’exploitant a présenté une demande de continuation au ministère de l’Énergie de l’Alberta, mais n’a pas inclus la cartographie interprétative. Le ministère de l’Environnement de l’Alberta a porté la lacune à l’attention de l’exploitant et a accordé une prolongation d’un mois. Les employés qui s’occupaient de la question ont déterminé, à tort, que la carte requise n’était pas disponible et ont laissé les baux expirer.

La Cour a mis particulièrement l’accent sur le fait que l’exploitant ne semblait pas avoir de système fiable en place pour traiter les renouvellements de baux. Aucun processus interne particulier n’a été déclenché lorsque le ministère de l’Énergie de l’Alberta a indiqué que la demande initiale était déficiente; les employés qui s’occupaient de l’affaire ne savaient pas ce qui était nécessaire pour maintenir les baux; il n’y avait pas de processus automatique pour renvoyer la question à des personnes bien informées.

Il convient de noter que, dans ces deux cas, les exploitants savaient qu’il y avait au moins une question qui nécessitait une attention particulière. Le défaut de tenir compte d’un avertissement ou de régler un problème connu semble être un déclencheur particulier pour conclure à une négligence grave. De plus, la décision Adeco laisse entendre que la négligence grave sera plus facile à prouver lorsqu’il y a défaut d’instituer un système raisonnable plutôt qu’une simple erreur individuelle dans un système par ailleurs acceptable.

Définition de la négligence grave par contrat

Il est de plus en plus courant pour les parties d’inclure une définition de la négligence grave dans leurs contrats. Cela donne aux parties une certitude au moins quant à ce que sera la norme et leur permet d’adopter une norme plus ou moins rigoureuse que celle élaborée par les tribunaux ou en vertu de la loi.

Cette tendance est évidente dans un certain nombre d’ententes types couramment utilisées par les sociétés énergétiques canadiennes. Par exemple, la procédure d’exploitation de 2007 de l’ASSOCIATION CANADIENNE DES LANDMEN COMPREND :

L’expression « négligence grave ou faute intentionnelle » s’entend de tout acte, omission ou omission d’agir (exclusif, conjoint ou simultané) d’une personne qui était destiné à causer un tel acte, ou qui a fait l’objet d’une insouciance téméraire ou d’une indifférence injustifiée à l’égard des conséquences préjudiciables pour la sécurité ou les biens d’une autre personne ou pour l’environnement que la personne agissant ou qui n’a pas agi savait (ou aurait dû connaître) résulterait d’un tel acte, omission ou défaut d’agir...

L’article 1.36 du modèle d’accord d’exploitation international de l’AIPN (Association of International Petroleum Negotiators) de 2002 combine également la négligence grave et l’inconduite délibérée, en les définissant collectivement comme suit:

Négligence grave ou inconduite volontaire désigne tout acte ou omission d’agir (qu’il soit unique, conjoint ou simultané) de la part d’une personne ou d’une entité qui était destiné à causer, ou qui était dans un mépris téméraire ou une indifférence injustifiée à l’égard des conséquences préjudiciables que cette personne ou entité connaissait, ou aurait dû connaître, un tel acte ou manquement aurait eu sur la sécurité ou la propriété d’une autre personne ou entité.

L’accord type d’exploitation d’unités de la PJVA (Petroleum Joint Venture Association) d’octobre 2003 comprend :

« Négligence grave » signifie :
i) un écart marqué et flagrant par rapport à la norme de conduite d’une personne raisonnable agissant dans les circonstances au moment de l’inconduite alléguée, ou
ii) une conduite ou des omissions dérédlées et imprudentes qui constituent en fait un mépris total à l’égard des conséquences préjudiciables, prévisibles et évitables ...

Les parties qui choisissent une définition doivent noter que la définition de la PJVA est la plus proche de refléter la jurisprudence canadienne. Les deux autres définitions placent la barre plus haut pour la négligence grave, la combinant avec l’inconduite volontaire et exigeant un élément moral d’intention ou de mépris/indifférence.

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