La Cour suprême confirme le caractère exécutoire des clauses restrictives dans les accords commerciaux

26 septembre 2013

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Écrit par Ranjan K. Agarwal

Il est bien établi en droit que les clauses restrictives (clauses de non-concurrence et de non-sollicitation) constituent une restriction au commerce et, en général, sont difficiles à appliquer dans les contrats de travail. Il incombe à l’employeur de prouver que l’engagement est raisonnable entre les parties en termes de portée, de géographie et de limite temporelle et raisonnable dans l’intérêt public.

La loi sur les clauses restrictives dans les accords de vente d’entreprises est moins claire, bien que les tribunaux soient moins rigoureux dans leur examen. Le manque de clarté de la loi est exacerbé dans les cas où le vendeur de l’entreprise accepte de continuer à travailler pour l’entreprise après l’acquisition.

Dans sa récente décision Payette v Guay inc,, la Cour suprême du Canada a clarifié le droit dans ce domaine. En particulier, la Cour indique clairement que « dans le contexte commercial, une clause restrictive est légale à moins qu’il ne puisse être établi, selon la prépondérance des probabilités, que sa portée est déraisonnable ».

Les faits

En octobre 2004, Yannick Payette et Louis Pierre Lafortune ont vendu leur entreprise de location de grues à Guay inc., une entreprise de location de grues. Le prix d’achat était de 26 millions de dollars, dont 14 millions de dollars en espèces.

La convention d’achat/vente prévoyait que Payette et Lafortune ne feraient pas concurrence à Guay pendant une période de cinq ans après la fin de leur emploi.

Dans le cadre de la convention d’achat/vente, Payette et Lafortune ont convenu de travailler comme consultants à temps plein pour Guay. À la fin de cette période de six mois, Payette a accepté de devenir un employé à temps plein de Guay, en concluant un contrat de travail avec Guay.

En août 2009, Guay a mis fin à l’emploi de Payette sans motif valable. Payette et Guay négocient une indemnité de départ. À ce moment-là, Payette a demandé le consentement de Guay pour accepter un emploi dans une entreprise qui n’est pas impliquée dans l’entreprise de location de grues. Guay a consenti.

En fait, Payette a commencé à travailler pour Mammoet Crane Inc., un concurrent direct de Guay dans le secteur de la location de grues. Sept des employés les plus expérimentés de Guay ont démissionné pour travailler avec Mammoet.

Guay obtint une injonction interlocutoire interdisant à Payette de travailler pour Mammoet jusqu’au procès. Lors de l’audition de l’affaire sur le fond, la Cour supérieure a conclu que les engagements étaient inapplicables, en grande partie au motif qu’il s’agissait d’engagements en matière d’emploi. 1 La Cour d’appel n’était pas d’accord, statuant que les engagements étaient des engagements commerciaux. La Cour suprême du Canada a confirmé à l’unanimité la décision de la Cour d’appel.

Examen de la question

La décision de la Cour suprême clarifie la loi régissant les clauses restrictives dans les accords commerciaux.

Premièrement, les règles régissant les clauses restrictives relatives à l’emploi ne s’appliquent pas « avec la même rigueur ou la même intensité » dans les ententes commerciales. Dans les contrats de travail, les tribunaux supposent qu’il existe un déséquilibre de pouvoir entre l’employeur et l’employé. Cette présomption n’existe pas dans les ententes commerciales, où l’objectif de l’acheteur dans la négociation d’une clause restrictive est de protéger son investissement en établissant des « liens solides » avec ses nouveaux clients, fournisseurs et employés. En termes pratiques, cela signifie que Payette, en tant que vendeur, avait le fardeau de prouver que les engagements sont déraisonnables sur le plan de la portée, de la durée et de la géographie (par opposition à l’employeur dans les conventions d’emploi).

Deuxièmement, si l’engagement est un « hybride » (comme en l’espèce), le tribunal tentera d’identifier clairement la raison pour laquelle et dans quel but le pacte a été conclu afin de déterminer s’il est lié au contrat de travail ou au contrat commercial. En l’espèce, la Cour a statué que Payette avait accepté les clauses restrictives dans le cadre de la vente de son entreprise et non dans le cadre de son emploi chez Guay.

Pour en arriver à cette conclusion, la Cour a identifié un certain nombre de facteurs :

Troisièmement, les engagements d’un accord commercial seront raisonnables à condition que la portée, la géographie et la durée temporelle soient limitées à « tout ce qui est nécessaire à la protection des intérêts légitimes » de l’acheteur. Pour décider du caractère raisonnable des clauses restrictives, les tribunaux tiendront compte du « prix de vente, de la nature des activités de l’entreprise, de l’expérience et de l’expertise des parties et du fait que les parties ont eu accès aux services d’un conseiller juridique et d’autres professionnels ».

En l’espèce, la Cour a conclu que Payette et Guay avaient eu de « longues négociations », qu’elles étaient toutes deux « bien informées » et conseillées par des « professionnels du droit et de la comptabilité », ce qui a mené à la conclusion qu’elles négociaient sur un pied d’égalité et sur un pied d’égalité. Dans ce contexte, la Cour a conclu que la durée des engagements (cinq ans à compter de la date de la fin de l’emploi de Payette) et du territoire (Québec) était à la fois raisonnable et a confirmé les engagements.

Conclusion

Cette affaire constitue une clarification bienvenue de la loi dans ce domaine. Il indique clairement que les parties averties et bien avisées seront tenues de tenir les promesses contractuelles. La Cour identifie également le type de preuve qui sera pertinent pour prouver le caractère raisonnable des clauses restrictives dans les accords commerciaux, y compris les conditions de la vente et la portée de l’entreprise acquise. 

Remarques :

  1. L’article 2095 du Code civil du Québec se lit comme suit: « Un employeur ne peut se prévaloir d’une stipulation de non-concurrence s’il a résilié le contrat sans raison sérieuse ou s’il a lui-même donné au salarié un tel motif pour résilier le contrat. »

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