Le 4 mars 2010, le ministre fédéral des Finances, l’honorable Jim Flaherty, a publié le budget fédéral de 2010. Le budget continue de mettre l’accent sur le plan d’action économique de l’an dernier et de s’appuyer sur celui-ci en mettant l’accent sur la création d’emplois et la croissance, le maintien des avantages économiques du Canada et la planification d’un retour à l’équilibre budgétaire. Bien qu’aucun changement n’ait été annoncé aux taux d’imposition du revenu des particuliers ou des sociétés, le ministre des Finances a réitéré son engagement à poursuivre les réductions de l’impôt sur le revenu des sociétés et des particuliers annoncées précédemment et à avoir le taux d’imposition du revenu des sociétés le plus bas du G7 d’ici 2012. Le budget était relativement léger sur les changements fiscaux, mais contenait encore de nombreux changements proposés d’intérêt pour le milieu des affaires, dont le moindre n’est pas un engagement à éliminer les « échappatoires fiscales injustes » et à introduire un régime de déclaration concernant la « planification fiscale abusive ». Voici un résumé de certains des faits saillants fiscaux les plus importants du budget.
En vertu du droit canadien, les non-résidents du Canada sont assujettis à l’impôt sur les gains réalisés lors de la disposition de biens canadiens imposables (BCI), ce qui comprend les actions de sociétés privées canadiennes et les actions de sociétés publiques canadiennes lorsque le non-résident (seul ou avec un lien de dépendance) possédait 25 % ou plus des actions émises d’une catégorie ou d’une série de la société à un moment donné au cours de la période de 60 mois précédant la vente.
Avant la mise en œuvre du budget, certains investisseurs pouvaient se prévaloir des exemptions découlant des conventions fiscales pour éviter l’impôt canadien sur la disposition de ces actions si les actions ne tiraient pas plus de 50 % de leur valeur d’un immeuble ou d’un bien minier situé au Canada. Toutefois, dans le contexte des actions de sociétés privées, ils devaient quand même donner un avis de la disposition et obtenir des « certificats de décharge en vertu de l’article 116 » avant qu’un acheteur ne cède la totalité du produit d’un achat au vendeur. Ce processus prenait beaucoup de temps et pouvait prendre jusqu’à un an pour obtenir le déblocage de tous les produits. De plus, de nombreux investisseurs n’étaient pas admissibles à l’exonération de la convention et ont dû payer de l’impôt canadien sur les gains en capital sur ces dispositions.
Le budget propose de modifier la définition de TCP à compter du 5 mars 2010 afin d’exclure les actions de sociétés privées canadiennes (et les actions de sociétés publiques canadiennes lorsque le seuil de propriété de 25 % a été dépassé) lorsque pas plus de 50 % de la juste valeur marchande des actions provient, directement ou indirectement, de biens immobiliers ou d’avoirs miniers canadiens (au moment de la vente et tout au long de la période de 60 mois précédant la vente).
Il s’agit d’une bonne nouvelle, car il n’y aura plus besoin de certificats de décharge ou de retenues en vertu de l’article 116 sur les dispositions d’actions de sociétés privées lorsque les actions ne tirent pas leur valeur primaire de biens immobiliers ou d’avoirs miniers canadiens. De plus, les investisseurs non-résidents qui ne résident pas dans les administrations visées par une convention fiscale ne seront plus assujettis à l’impôt canadien sur les gains réalisés sur les dispositions d’actions de sociétés canadiennes à l’extérieur des secteurs des ressources et de l’immobilier.
Bien que ce changement n’élimine pas l’impôt canadien et la nécessité de retenues et de certificats de décharge en vertu de l’article 116 sur les dispositions d’actions de sociétés privées de ressources ou d’immeubles, il peut accélérer le processus de retenue et de dédouanement en vertu de l’article 116 en supprimant d’autres dispositions du processus de certificat de décharge. Il convient également de noter qu’il peut y avoir des structures de détention disponibles pour éliminer ou réduire l’impôt canadien sur la vente d’entreprises de ressources et immobilières.
Nous considérons ce changement comme une indication tangible de l’engagement du Canada à soutenir des processus efficaces d’entrée et de sortie du marché canadien par des capitaux étrangers, à rendre les règles nationales du Canada conformes à bon nombre des conventions fiscales du Canada et aux lois des principaux partenaires commerciaux du Canada comme les États-Unis, et à aider les entreprises canadiennes à attirer des capitaux étrangers.
Les règles fiscales du Canada relatives aux fiducies non-résidentes (TRN) et aux entités de placement étrangères (EPÉ) font depuis longtemps l’objet de débats et de consternations. L’objectif fondamental des règles est de veiller à ce que les Canadiens soient empêchés de recourir à des intermédiaires étrangers pour éviter de payer de l’impôt canadien. Cependant, les anciennes règles étaient considérées par les autorités fiscales canadiennes comme trop faibles. Par conséquent, de nouvelles ébauches de règles sont apparues pour la première fois en 1999 et ont été modifiées à plusieurs reprises pour répondre aux préoccupations fondamentales de la communauté fiscale concernant la complexité et la portée extrêmement large des règles. En fin de compte, ces préoccupations ont persisté et les nouvelles règles proposées n’ont toujours pas été promulguées dans la loi.
Le budget propose maintenant d’autres changements importants aux règles sur les TRN et les EPÉ. Les commentaires du public sur les nouvelles propositions seront acceptés avant le 4 mai 2010.
En un mot, les versions précédentes proposées des règles sur les EPÉ ont été abandonnées et de nouvelles règles ont été proposées qui s’appuient sur les règles actuelles relatives aux « biens des fonds d’investissement à l’étranger ». Ces nouvelles règles, qu’il est proposé d’appliquer pour les années d’imposition se terminant après le 4 mars 2010, permettront généralement a) d’accroître les exigences de déclaration des bénéficiaires de certaines fiducies étrangères et des contributeurs à celles-ci, b) d’augmenter le taux d’intérêt prescrit applicable aux participations dans des biens de fonds de placement à l’étranger, et c) de prolonger le délai de prescription dans lequel les contribuables qui sont visés par ces règles peuvent faire l’objet d’une nouvelle cotisation. Pour les contribuables qui se sont volontairement conformés aux versions antérieures proposées des règles sur les EPÉ, un choix sera offert pour atténuer certaines des conséquences négatives des nouvelles règles.
Les nouvelles règles relatives à la TRN visent à simplifier et à restreindre les propositions précédentes. Contrairement aux propositions relatives aux EPÉ, les nouvelles règles sur la TRN maintiennent essentiellement la structure des propositions provisoires les plus récentes, mais elles introduisent ou élargissent les exemptions applicables à un certain nombre de scénarios non offensants, y compris les fiducies commerciales de bonne foi, les entités exonérées d’impôt et les opérations mettant en cause des institutions financières canadiennes. Les propositions relatives à la TRN prévoient également de prolonger de trois ans le délai de prescription pour l’nouvelle cotisation des contribuables détenant des participations dans les TRN. Ces nouvelles propositions sont censées s’appliquer à compter de 2007, avec un allègement facultatif potentiel offert aux contribuables qui se sont fiés aux propositions législatives précédentes.
Ces objectifs sont louables, car les versions antérieures de la législation sur l’EPÉ et la TRN étaient trop larges et pratiquement irréalisables dans de nombreux contextes. Cependant, comme toujours, nous attendrons la plus récente version de l’avant-projet de loi régissant les deux propositions avant de déclarer tout type de victoire dans la longue saga sur les entités de placement étrangères et les fiducies non-résidentes.
Selon le budget, certaines sociétés canadiennes se sont livrées à des stratagèmes de « générateur de crédit pour impôt étranger » visant à éviter l’impôt à l’égard du revenu d’intérêts sur les prêts indirects à des sociétés étrangères gagnés par l’entremise d’une société de personnes ou d’une société étrangère affiliée. Pour donner suite à de tels plans, le budget propose de refuser les demandes et les déductions du crédit pour impôt étranger au titre de l’impôt étranger accumulé et de l’impôt étranger sous-jacent lorsque la législation fiscale de l’administration étrangère considère que la société canadienne a une participation directe ou indirecte dans la société ou l’entité étrangère moins élevée que celle que la société canadienne est considérée comme ayant aux fins de l’impôt canadien.
Les sociétés canadiennes qui gagnent un revenu assujetti à l’impôt étranger par l’entremise d’une société de personnes ou d’une société étrangère affiliée devront examiner attentivement l’application possible de ces nouvelles règles, en particulier lorsque les actions d’une société étrangère affiliée ou d’une entité sont assujetties à une opération de prise en charge ou lorsqu’une entité peut être traitée comme une entité « hybride » ou « fiscalement transparente » en vertu du droit fiscal étranger.
Ces nouvelles mesures entreront en vigueur pour les impôts étrangers engagés à l’égard des années d’imposition se terminant après le 4 mars 2010 (et pourraient donc inclure les impôts étrangers payés avant l’annonce du budget). Le ministère des Finances encourage les intervenants intéressés à soumettre leurs commentaires sur les propositions avant le 4 mai 2010.
En prévision des changements fondamentaux apportés à l’imposition des fiducies de revenu et des sociétés de personnes canadiennes en 2011, bon nombre de ces fiducies et sociétés de personnes (EIPD) ont été converties en sociétés. Un certain nombre de ces opérations de conversion ont été structurées de manière à permettre à l’UES convertie d’utiliser les pertes fiscales d’une société à perte préexistante ou de « Perte ltée ». Essentiellement, ce type de planification comprend une opération de « prise de contrôle inversée » en vertu de laquelle de nouvelles actions de Perte Ltée sont émises en échange de participations dans la fiducie ou la société de personnes en cours de conversion. L’opération n’a pas entraîné d’acquisition du contrôle de la perte Ltée (évitant ainsi une « diffusion » ou une « succession » des pertes fiscales de PerteS Ltée). Cela a été possible parce que les règles qui empêchaient ce résultat lorsque deux sociétés étaient regroupées dans un scénario de prise de contrôle inversée ne s’appliquaient pas lorsqu’une fiducie ou une société de personnes était combinée à une société.
Le budget propose de modifier les règles sur l'« acquisition de contrôle » par les sociétés afin que les conversions d’entreprises soient maintenant interceptées. La modification est en vigueur pour les transactions effectuées après 16 h 00 HNE le 4 mars 2010. Les opérations prébudgétaires bénéficient de droits acquis, tout comme les opérations que les parties sont tenues d’effectuer en vertu d’une entente écrite conclue avant cette date (à moins que l’accord ne contienne une modification de la loi fiscale ). Ce changement n’était pas tout à fait inattendu, car il avait été commenté dans les médias d’information et mentionné par le ministre des Finances dans une récente déclaration publique.
Un changement avantageux annoncé dans le budget dans le contexte des conversions d’EID est que les règles sur l’acquisition de contrôle doivent être modifiées pour s’assurer qu’elles ne s’appliquent pas lorsque la fiducie d’EIMC est liquidée et distribue les actions d’une société qu’elle détient. Selon ce changement, lorsque le seul bénéficiaire d’une fiducie d’EID à la suite d’une conversion est une société, la liquidation de la fiducie ne déclenchera pas l’acquisition du contrôle de sociétés détenues en deçà de la fiducie.
Le budget propose trois changements importants à la façon dont les employés et les employeurs sont imposés à l’égard des options d’achat d’actions.
Premièrement, le budget élimine le report qui a été instauré dans le budget fédéral de 2000 et qui permettait aux employés des sociétés publiques de choisir de reporter l’inclusion dans le revenu associée à l’exercice d’une option d’achat d’actions jusqu’à l’année au cours de laquelle les actions sous-jacentes sont vendues. Un report semblable dans le contexte des options d’achat d’actions des employés émises par des sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) demeurera disponible.
À titre de mesure d’allègement partiel, le budget propose de permettre aux employés qui ont fait des choix de report de s’assurer que l’impôt à payer sur l’avantage relatif aux options d’achat d’actions différées ne dépasse pas le produit de la disposition des actions dans des circonstances où la valeur des actions a diminué à compter de la date d’exercice, en tenant compte de l’allégement fiscal découlant des pertes en capital sur les actions contre les gains en capital provenant d’autres sources. Toutefois, les employés qui ont exercé des options de SPCC continueront de subir des conséquences fiscales négatives lorsque la valeur des actions diminue à compter de la date d’exercice.
Deuxièmement, les employeurs ne pourront plus « encaisser » les détenteurs d’options en vertu des règles sur les options d’achat d’actions préférentielles et obtenir une déduction correspondante en même temps. En vertu des règles actuelles, un arrangement d’options d’achat d’actions d’employés pourrait généralement être structuré de manière à permettre à l’employé de recevoir de l’argent plutôt que des actions au moment de l’exercice et d’être toujours admissible à la déduction de 50 % pour les options d’achat d’actions des employés, tandis que l’employeur réaliserait une déduction pour le paiement (les employeurs ne peuvent pas demander une déduction lorsque des actions d’options d’achat d’actions sont émises).
Après le 4 mars 2010, un employé ne sera plus admissible à la déduction pour option d’achat d’actions de 50 % à l’égard des paiements en espèces (c.-à-d. qu’il doit réellement acquérir les actions), à moins que l’employeur ne fasse le choix de ne pas déduire tout montant payé à l’employé relativement à l’encaissement de l’option d’achat d’actions. Il semble que le choix ne s’applique qu’à l’octroi spécifique d’options couvertes par le choix (plutôt qu’à l’échelle mondiale à toutes les subventions). Il n’est pas clair dans les documents budgétaires si la modification proposée et la capacité de faire le choix s’appliquent aux options accordées après la date du budget, ou aux options aliénées après la date du budget, ce qui peut être un problème important pour de nombreux régimes d’options.
Troisièmement, le budget propose de clarifier les règles existantes afin d’exiger qu’un employeur (autre qu’une SPCC) verse à l’Agence du revenu du Canada (ARC) la retenue appropriée à l’égard des avantages liés aux options d’achat d’actions des employés sur la même base que si l’avantage avait été payé en espèces à titre de prime (en tenant compte de l’avantage de la déduction de 50 % pour les options d’achat d’actions des employés dans la mesure où elle est disponible). En vertu des règles actuelles, il n’était pas clair dans quelle mesure l’employeur devait verser dans le cas d’un employé qui était rémunéré principalement au moyen d’avantages liés aux options d’achat d’actions, et l’ARC avait une position administrative favorable qui n’exigeait pas de retenue dans certaines circonstances où cela causerait un préjudice injustifié à l’employé. Cette modification doit s’appliquer aux titres acquis par les employés après 2010 et ne s’appliquera pas aux options d’achat d’actions accordées avant 2011 aux termes d’une convention écrite conclue avant 16 h 00 HNE le 4 mars 2010, lorsque la convention comprenait des restrictions à la capacité de l’employé de disposer des titres sous-jacents.
Le changement visant à exiger des retenues à la source à l’égard des options d’achat d’actions qui ne sont pas des SPCC peut causer des problèmes lorsque les avantages liés aux options d’achat d’actions constituent une composante importante de la rémunération globale d’un employé. Les employés et les employeurs devront peut-être chercher des moyens de financer efficacement la retenue à même l’argent comptant autrement qu’à même le salaire payable à l’employé, en s’appuyant peut-être davantage sur des plans d’exercice dits « sans numéraire » lorsque les options sont exercées par l’entremise d’un agent administratif et que les actions sont immédiatement vendues, le prix d’exercice et les retenues à la source étant financés à même le produit de la vente.
Une plainte de longue date au sujet du régime fiscal canadien est l’absence d’un mécanisme législatif pour transférer les pertes entre les membres d’un groupe de sociétés. Bien que l’utilisation des pertes intra-groupe puisse encore être possible et qu’elle ait généralement été jugée acceptable sur le plan de la politique fiscale, elle peut être lourde et complexe.
Le budget propose d’examiner si de nouvelles règles pour l’imposition des groupes de sociétés (y compris l’introduction d’un système officiel de transferts de pertes ou de déclaration consolidée) amélioreraient l’efficacité des lois fiscales du Canada. Il s’agit d’un développement bienvenu, bien qu’il soit clairement à un stade précoce et que de réels changements ne soient pas susceptibles d’apparaître avant 2011 au plus tôt.
obligatoire La règle générale anti-évitement (RGAE) actuelle dans la législation fiscale du Canada sert de règle de dernier recours pour lutter contre la planification fiscale abusive. Toutefois, contrairement à certaines administrations (y compris les États-Unis et, plus récemment, la province de Québec), la RGAE ne contient aucune exigence de déclaration obligatoire pour les opérations qui peuvent être considérées comme agressives par l’ARC.
Le budget propose de tenir une consultation publique sur les propositions visant à exiger la déclaration de certaines « opérations d’évitement fiscal ». En particulier, il propose un nouveau régime selon lequel les contribuables devraient déclarer une opération à l’ARC si elle contenait certaines « caractéristiques » de stratagèmes d’évitement fiscal, y compris a) le droit d’un promoteur ou d’un conseiller fiscal à des frais conditionnels à la réussite d’un régime fiscal donné, et b) une opération qui est assujettie à des restrictions en matière de confidentialité. Si un contribuable omet de déclarer une telle opération en temps opportun, l’avantage fiscal pourrait être refusé ou assujetti à des pénalités.