En 2003, le caribou des bois a été inscrit comme espèce menacée en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP)1, ce qui signifie qu’un programme de rétablissement de l’espèce devait être préparé par le ministre fédéral de l’Environnement (M) d’ici 2007. Toutefois, aucun programme de rétablissement de ce genre n’a été préparé à ce jour.
En juillet et en août 2010, un consortium de Premières Nations du Traité no 6 et du Traité no 8 et de groupes environnementaux a présenté des lettres au M détaillant ce qu’ils ont décrit comme des menaces imminentes pour le caribou des bois et demandant au M de recommander au Cabinet fédéral d’émettre un décret d’urgence pour protéger l’habitat de sept hardes de caribous situées dans le nord-est de l’Alberta. En mars 2011, le député a émis l’opinion qu’il n’y avait pas de menace imminente pour le rétablissement du caribou et qu’il n’était pas nécessaire de recommander que le Cabinet fédéral émette un décret d’urgence.
Dans une demande de contrôle judiciaire présentée par les Premières Nations et des groupes environnementaux et entendue par la Cour fédérale du Canada les 22 et 23 juin 2011, les demandeurs ont demandé ce qui suit :
Pour plus de détails sur le contexte de la demande et des procédures connexes, veuillez consulter la mise à jour précédente de Bennett Jones, Federal Court Considers Adequacy of Canada’s Protection of Northeastern Alberta’s Caribou (30 juin 2011).
Le 28 juillet 2011, la Cour a rendu sa décision2 dans laquelle elle a
Chaque constatation est examinée ci-dessous.
La Cour a annulé la décision du M de ne pas recommander au Cabinet fédéral d’émettre une ordonnance d’urgence et a renvoyé la question au M pour réexamen pour deux motifs principaux.
Premièrement, compte tenu d’une décision antérieure de la Cour suprême du Canada dans laquelle la Cour a statué que les interprétations des dispositions législatives qui ont une incidence sur les droits issus de traités ou les droits ancestraux doivent être abordées d’une manière qui préserve l’intégrité de la Couronne, la Cour a conclu que le M avait « clairement commis une erreur » en ne tenant pas compte des droits issus de traités et de l’honneur de la Couronne dans l’interprétation de son mandat en vertu de la disposition de la LEP relative aux ordonnances d’urgence. La Cour a également conclu qu’après réexamen, le M doit tenir compte à la fois de l’incidence de la disparition des troupeaux sur le mode de vie autochtone; et dans quelle mesure la violation continue de la LEP (en omettant d’afficher un programme de rétablissement) et l’inaction continue à l’égard du caribou seraient compatibles avec l’honneur de la Couronne, une question qui, selon la Cour, était susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte.
Deuxièmement, la Cour a conclu que la décision du M ne contenait aucune discussion significative sur le fondement de la conclusion qu’il n’y a pas de menaces imminentes pour le rétablissement national du caribou. À cet égard, la Cour a fait remarquer que les demandeurs, le public et la Cour ont dû spéculer sur :
Par conséquent, la Cour a ordonné au M de réexaminer la question de savoir s’il y avait lieu de recommander au Cabinet fédéral la délivrance d’une ordonnance d’urgence, laquelle révision doit être effectuée conformément aux motifs de la Cour.
La décision de la Cour de reporter son examen de la question de savoir s’il y avait eu ou non un jugement déclaratoire portant que le M n’avait pas respecté la date limite prévue par la loi pour la publication du programme de rétablissement était fondée en grande partie sur le fait que le procureur général, au nom du M, s’était engagé à ce que le programme de rétablissement soit publié d’ici la fin de l’été. La décision ne sait pas très bien ce qui se passera si l’exécution du programme de rétablissement est retardée davantage; toutefois, on s’attend à ce que, dans ces circonstances, les demandeurs demandent une décision à la Cour.
Bien que la décision relative au décret d’urgence ait été renvoyée au M pour réexamen, le M peut néanmoins décider de ne pas recommander au Cabinet fédéral l’émission d’un décret d’urgence. À cet égard, si le M tient compte de tous les facteurs pertinents (y compris les répercussions potentielles sur les droits issus de traités et les droits ancestraux qui touchent l’honneur de la Couronne) et fournit des raisons valables à l’appui de son opinion, une décision de ne pas recommander l’émission d’un décret d’urgence peut être appuyable. Même si le M est d’avis qu’un décret d’urgence devrait être recommandé, il reste loisible au Cabinet fédéral d’évaluer tous les renseignements disponibles, y compris les répercussions qu’un décret d’urgence aurait sur la mise en valeur des ressources et d’autres facteurs d’intérêt public, et de refuser d’émettre un tel décret. Fait important, la Cour n’a fourni aucun délai dans lequel le M doit réexaminer la question.
Qu’un décret d’urgence soit émis ou non, un programme de rétablissement pour le caribou des bois est susceptible d’être publié dans un proche avenir. Si l’une d’elles n’est pas libérée avant le délai du 1er septembre 2011 établi dans la décision de la Cour, il sera loisible aux demandeurs de demander une autre directive à la Cour concernant un jugement déclaratoire concernant le manquement du M. Il sera important que les promoteurs de ressources dont les projets pourraient avoir une incidence sur l’habitat du caribou des bois continuent de suivre l’évolution de cette question et, en particulier, la publication présumée d’un programme de rétablissement en septembre.