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La Cour de l’impôt confirme une structure de détention canadienne fondée sur une convention fiscale

04 septembre 2018

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Écrit par Greg M. Johnson and Wade Ritchie

La Cour canadienne de l’impôt a récemment statué, dans Alta Energy Luxembourg SARL v R, 2018 TCC 152, qu’une S.A.R.L luxembourgeoise avait droit aux avantages de la convention sur les gains en capital et que la règle générale anti-évitement (« RGAE ») ne s’appliquait pas à la disposition d’actions d’une société canadienne de ressources.

La Cour de l’impôt a adopté une approche commercialement réaliste dans son interprétation de l’exception relative aux biens exclus prévue au paragraphe 13(4) de la convention fiscale entre le Canada et le Luxembourg (la « Convention ») et a conclu qu’un droit direct mis de côté pour de futures activités de forage ou d’extraction peut être considéré comme un bien dans lequel une entreprise est exploitée et donc exclu du traitement comme un bien immeuble. En conséquence, les gains provenant de l’aliénation d’actions qui tirent principalement leur valeur de ces biens sont imposables au Luxembourg, c’est-à-dire le pays où l’actionnaire cédant réside. Ces gains seront généralement libres d’impôt en vertu de la législation fiscale nationale du Luxembourg.

Les faits

Alta Energy Partners, LLC (« Alta US LLC »), une société du Delaware, a été créée en 2011 et a par la suite constitué Alta Energy Partners Canada Ltd. (« Alta Canada ») en Alberta. Alta Canada a exercé une entreprise de pétrole de schiste non conventionnel dans la formation Duvernay, dans le nord de l’Alberta. Alta Canada a foré six puits entre 2012 et 2013 et, au 28 mars 2013, détenait des baux et des permis de pétrole et de gaz naturel représentant des intérêts d’exploitation dans 67 891 acres nettes dans la formation Duvernay. Les actions d’Alta Canada tiraient leur valeur principalement de ces participations déterminées, qui étaient admissibles à titre d'« avoir minier canadien » au sens du paragraphe 66(15) de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « Loi »). Par conséquent, les actions d’Alta Canada étaient des « biens canadiens imposables » au sens du paragraphe 248(1) de la Loi.

Une restructuration a eu lieu en 2012 en vertu de laquelle Alta US LLC a vendu toutes les actions d’Alta Canada à Alta Energy Luxembourg S.A.R.L. nouvellement formée (« Luxco »). En 2013, Luxco a vendu ses actions d’Alta Canada (qui en représentaient 100 pour cent) à Chevron pour près de 680 millions de dollars et a réalisé un gain en capital de plus de 380 millions de dollars, qui, selon Luxco, était exonéré de l’impôt canadien en vertu de la Convention.

Le Traité Canada-Luxembourg

En vertu de l’article 13(4) de la Convention, les gains qu’un résident du Luxembourg tire de la vente d’actions d’une société, autres que des actions cotées à une bourse de valeurs agréée au Canada, seront imposés au Canada lorsque :

  1. les actions vendues faisaient partie d’une participation substantielle (c’est-à-dire au moins 10 pour cent) du capital-actions de la société; et
  2. les actions tiraient leur valeur principalement de biens immobiliers situés au Canada.

Pour l’application de l’article 13(4) du Traité, les biens immeubles « ne comprennent pas les biens (autres que les biens locatifs) dans lesquels l’entreprise de la société, de la société de personnes, de la fiducie ou de la succession a été exploitée ». Luxco a soutenu que cette « exception relative aux biens exclus » s’appliquait à sa vente d’actions d’Alta Canada à Chevron et que, par conséquent, le gain en capital de 380 millions de dollars n’était pas imposable au Canada.

L’article 13(5) du Traité prévoit que les gains provenant de l’aliénation de biens, autres que ceux visés aux articles 13(1) à (4) du Traité, ne sont imposables que dans le pays où le cédant est résident- c’est-à-dire au Luxembourg dans ce cas.

La question était essentiellement de savoir si Alta Canada exerçait des activités sur ses intérêts de travail qui ont été mis de côté pour le développement et la production futurs. Le ministre a soutenu que l’exception relative aux biens exclus s’appliquait permis par permis et qu’une réserve pétrolière et gazière ne peut être considérée comme une propriété exclue que lorsqu’elle est exploitée activement.

La Cour de l’impôt a résumé l’argument du ministre comme suit :

[49] Selon l’intimé, un intérêt pratique n’est pas admissible à titre de « bien exclu » si le droit de roulement a été mis de côté pour des activités de forage ou d’extraction futures. Sur ce point, l’intimé soutient que l’expression « biens dans lesquels l’entreprise a été exploitée » désigne un bien dans lequel l’entreprise de la société est située et exploitée.

En rejetant l’argument du ministre, la Cour de l’impôt a discuté des réalités commerciales de l’industrie pétrolière et gazière, y compris le processus de détermination systématique de la viabilité économique de l’extraction des hydrocarbures des intérêts de travail avant de commencer le forage et la production.

La Cour de l’impôt a déclaré qu’étant donné que l’objet de l’exception relative aux biens exclus est d’attirer des investissements étrangers, il est raisonnable de présumer que les négociateurs de la convention voulaient que l’exception relative aux biens exclus s’applique lorsque les ressources pétrolières et gazières sont exploitées conformément aux « meilleures » pratiques de l’industrie. Par conséquent, comme la Cour de l’impôt a conclu que les activités d’exploitation d’Alta Canada étaient commercialement raisonnables et prudentes, tous les intérêts d’exploitation d’Alta Canada étaient des biens dans lesquels son entreprise était exploitée et l’exception relative aux biens exclus s’appliquait à tous ces intérêts. Par conséquent, le paragraphe 13(4) de la Convention ne s’appliquait pas à l’imposition du gain de 380 millions de dollars au Canada et l’article 13(5) s’appliquait plutôt à l’imposition du gain au Luxembourg, où les gains en capital sont généralement libres d’impôt en vertu des lois fiscales nationales. La Cour de l’impôt a déclaré que l’exception relative aux biens exclus s’applique lorsque la ressource est exploitée conformément aux « pratiques exemplaires ». À notre avis, cette partie de la décision peut donner lieu à une certaine incertitude quant aux pratiques exemplaires, mais nous soutenons qu’il faut faire preuve de retenue à l’égard de la direction dans la façon dont elle met en valeur les ressources et que le mot « meilleur » n’ajoute pas d’exigence supplémentaire. L’accent devrait plutôt être mis sur les réalités commerciales et les pratiques généralement acceptées ou prudentes de l’industrie, en ce qui concerne particulièrement les circonstances uniques de chaque contribuable. La Cour de l’impôt a également confirmé le principe selon lequel les conventions fiscales doivent recevoir une interprétation libérale qui l’a aidée à en arriver à sa décision.

La règle générale anti-évitement

Pour que la RGAE s’applique, il doit y avoir (1) un avantage fiscal, (2) une opération d’évitement et (3) l’opération d’évitement doit avoir été abusive. L’appelante a admis qu’elle tirait un avantage fiscal de la restructuration de ses activités des États-Unis au Luxembourg et que cette restructuration était qualifiée d’opération d’évitement car il n’y avait aucune raison de bonne foi pour la restructuration autre que d’obtenir un avantage fiscal. La seule question qu’il restait à la Cour de l’impôt à examiner en RGAE était donc de savoir si l’opération d’évitement était abusive.

Le ministre a allégué que les articles 38 et 39, les paragraphes 2(3) et 248(1) et l’alinéa 115(1)b) de la Loi ont fait l’objet d’abus, en plus des articles 1, 4 et 13 du Traité. La Cour a rapidement rejeté l’abus allégué à l’encontre des dispositions de la Loi (car elles ne s’appliquaient pas aux « biens protégés par traité ») et a porté son attention sur l’utilisation abusive ou abusive alléguée du Traité.

Le ministre a affirmé que la raison d’être et l’objet de la Convention sont d’éviter la double imposition. La Cour de l’impôt a fait remarquer que la Convention est en fait un instrument polyvalent et qu’il fallait déterminer les objets précis des articles qui auraient fait l’objet d’abus.

Le Modèle de traité de l’OCDE ne prévoit pas d’exclusion pour les biens immeubles semblable à l’exception des biens exclus et les négociateurs de la convention sont présumés avoir su que le Luxembourg permet généralement à ses résidents d’éviter l’impôt sur les gains provenant de la disposition d’actions de sociétés étrangères dans certaines circonstances. Dans ce contexte, la Cour a déclaré ce qui suit :

[85] Dans cette optique, si le Canada souhaitait réduire les avantages de la Convention aux situations potentielles de double imposition, il aurait pu insister pour que l’exonération prévue à l’article 13(5) ne soit accordée que dans les circonstances où le gain en capital était par ailleurs imposable au Luxembourg. Le Canada et le Luxembourg n’ont pas choisi cette option.

La Cour a également noté que le traité ne contenait pas beaucoup de dispositions de limitation et a fait référence à la prescription du « bénéficiaire effectif » dans les articles 10, 11 et 12 du traité, qui n’étaient pas applicables à l’article 13 du traité.

La Cour a également tenu compte des règles anti-chalandage fiscal énoncées dans le Traité Canada-États-Unis et le Modèle de convention de l’OCDE, ainsi que des modifications proposées par le ministère des Finances annoncées dans les budgets fédéraux de 2013 et de 2014 pour l’introduction d’une règle nationale anti-chalandage fiscal. La Cour a cité la jurisprudence à l’appui de la position selon laquelle le Traité ne devrait pas être appliqué de manière sélective. C’est-à-dire que si une personne est déterminée comme étant un résident du Luxembourg en vertu du Traité, elle peut utiliser l’exemption de propriété exclue le ministre ne peut pas utiliser la RGAE pour faire face à ce que le ministère des Finances considère comme une lacune involontaire dans le Traité.

La Cour a conclu ce qui suit :

[100] La raison d’être de l’exclusion est d’exempter les résidents du Luxembourg de l’impôt canadien lorsqu’il y a un investissement dans des biens immobiliers utilisés dans une entreprise. Les investissements importants de l’appelant pour réduire les risques liés aux schistes de Duvernay constituent un investissement dans un immeuble utilisé dans une entreprise. Par conséquent, je conclus que la RGAE ne s’applique pas pour empêcher l’appelant de demander l’exemption prévue au paragraphe 13(5) du Traité.

Par conséquent, l’appel de l’appelant a été accueilli et l’affaire a été renvoyée au ministre pour réexamen et réévaluation conformément aux motifs de la Cour.

La Cour a également examiné les allégations du ministre selon lesquelles Luxco était un « intermédiaire » pour ses actionnaires qui n’étaient généralement pas des résidents du Luxembourg et qui n’avaient généralement pas droit à des avantages similaires prévus par la convention dans leurs juridictions respectives. La Cour de l’impôt a fait remarquer que le terme « intermédiaire » n’a pas de sens juridique précis, mais elle a réaffirmé l’argument du ministre pour signifier que Luxco était présumée être un mandataire ou un simple candidat. En rejetant cet argument, la Cour de l’impôt a souligné que le ministre avait établi une cotisation à Luxco conformément au fait qu’elle était le propriétaire véritable des actions cédées, plutôt que d’être un mandataire de ses actionnaires.

L’IML

Il convient de noter que l’instrument multilatéral (ou « IMI »), lorsqu’il sera en vigueur, aura une incidence sur l’analyse et examinera de près l’utilisation des avantages de la convention en vertu d’un critère de l’objet principal (« PPT »). On s’attend à ce que l’INSTRUMENT MULTILATÉRAL (et le PPT) réduisent l’utilisation de ces types de structures. Toutefois, pour les aliénations de sociétés canadiennes du secteur des ressources qui ont eu lieu avant l’entrée en vigueur de l’INSTRUMENT MULTILATÉRAL, cette décision est utile.

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