Les sociétés multinationales, les investissements transfrontaliers et de nombreuses autres entreprises publiques et privées canadiennes seront probablement bientôt confrontés à une nouvelle limite complexe de déduction des frais d’intérêt au Canada.
Le 4 février 2022, le gouvernement fédéral canadien a publié draft legislation to implement a variety of proposed tax measures including the new « Excessive Interest and Financing Expenses Limitation » (EIFE Limit) first announced in the Budget fédéral d’avril 2021. L’idée maîtresse du plafond de l’EIFE proposé, qui est contenu principalement dans les articles 18.2 et 18.21 proposés de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada), est de limiter les déductions d’intérêts et de frais de financement canadiens d’un contribuable à un montant correspondant au revenu imposable généré par son activité économique canadienne, en fonction du bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (BAIIA) corrigé de l’impôt. La limite EIFE est alignée sur les recommandations de l’OCDE concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices.
Dans la plupart des cas, le plafond de l’EIFE s’appliquera, s’il est adopté, aux années d’imposition commençant le 1er janvier 2023 ou après cette date. Par conséquent, les contribuables touchés devraient prendre des mesures dès maintenant pour évaluer comment ils peuvent être touchés par la limite de l’EIFE.
La limite EIFE n’est pas subordonnée à un but d’évitement ou à un but infâme; elle s’applique mécaniquement. Fondamentalement, le plafond de l’EIFE adopte une approche de « dépouillement des gains », qui limite les déductions d’un contribuable (ou d’un groupe) pour les intérêts nets et les frais de financement à un ratio fixe de son « revenu imposable rajusté » généré par des activités au Canada. Le « revenu imposable ajusté » est généralement le BAIIA, mais il est déterminé en fonction de concepts fiscaux plutôt que comptables. Le ratio fixe sera généralement de 40 % pour les années d’imposition commençant dans l’année civile 2023 et de 30 % par la suite, sous réserve d’une règle anti-évitement pour les contribuables qui tentent de manipuler leurs années d’imposition.
Notamment, le « revenu imposable rajusté » d’un contribuable est réduit par les déductions reçues pour les dividendes intersypiques et par la plupart des pertes en capital et des pertes en capital nettes déduites par le contribuable. Comme l’indiquent les notes explicatives du ministère des Finances, il en résulte que le plafond de l’EIFE peut limiter la déductibilité des frais d’intérêt engagés par un contribuable pour investir dans des actions qui versent des dividendes.
Le plafond de l’EIFE s’appliquera aux « intérêts et frais de financement » qui, en plus des intérêts dans le cours normal des activités et de diverses dépenses de financement, comprennent également les intérêts et les frais de financement qui sont habituellement capitalisés et déduits à titre de déduction pour amortissement ou de montants à l’égard des fonds communs de ressources et de certains montants équivalents sur le plan économique, comme les intérêts intégrés dans les paiements de location.
Le plafond EIFE s’appliquera également après l’application des limites existantes sur la déductibilité des intérêts (p. ex., les règles de capitalisation restreinte et les règles sur les prix de transfert). Par conséquent, si une autre règle refuse une déduction des intérêts, ces intérêts sont exclus lors de l’application du plafond EIFE.
Le plafond eife est destiné à s’appliquer aux grandes entreprises multinationales et aux investissements transfrontaliers, y compris les non-résidents du Canada, où il existe un risque accru d’érosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices. Les règles s’appliquent aussi indirectement aux sociétés de personnes. Les règles proposées prévoient une exclusion pour :
Par conséquent, la plupart des petites et moyennes entreprises canadiennes qui exercent leurs activités exclusivement au Canada devraient être exemptées. Les contribuables sont encouragés à examiner leur droit à un allègement en vertu de ces dispositions en fonction de leur situation particulière.
Pour s’assurer que le plafond EIFE n’a pas d’incidence négative sur les opérations d’utilisation des pertes couramment entreprises entre les membres d’un groupe affilié, deux sociétés canadiennes imposables liées peuvent choisir conjointement d’exclure un ou plusieurs paiements d’intérêts intersociétés de la limite EIFE.
À moins d’être assujetti à la règle du ratio de groupe dont il est question ci-dessous, un contribuable aura une « capacité excédentaire » au cours d’une année donnée lorsque sa capacité de déduction pour l’année, fondée sur son revenu imposable rajusté, dépassera ses frais d’intérêt et de financement. Sous réserve que le contribuable fasse l’objet d’une acquisition de contrôle, la capacité excédentaire peut être reportée prospectivement sur trois ans et sera automatiquement appliquée pour réduire le montant des intérêts et des frais de financement dont la déductibilité serait autrement refusée.
Si un contribuable lui-même n’a pas suffisamment d’excédents de capacité reportés, il peut se fier aux transferts de la « capacité excédentaire inutilisée cumulative » d’un ou de plusieurs membres de son groupe canadien pour réduire le montant des intérêts et des frais de financement dont la déductibilité serait autrement refusée. Les transferts de capacité excédentaire inutilisée cumulative nécessitent un choix conjoint de la part du cédant et du cessionnaire et ne peuvent avoir lieu qu’entre des sociétés canadiennes imposables liées ou affiliées.
Si un contribuable se voit refuser une déduction d’intérêts ou de frais de financement en vertu du plafond de l’EIFE, le montant refusé est ajouté aux « intérêts restreints et aux frais de financement » du contribuable et peut être reporté prospectivement sur 20 ans. Le contribuable peut déduire ses « intérêts restreints et ses frais de financement » au cours d’une année future s’il a une capacité excédentaire au cours de l’année ou s’il a reçu un transfert de la « capacité excédentaire inutilisée cumulative » d’un autre membre du groupe. Les « intérêts restreints et les frais de financement » d’un contribuable demeurent généralement déductibles à la suite d’une acquisition de contrôle à condition que le contribuable continue d’exercer la même entreprise.
Les membres canadiens d’un groupe consolidé multinational peuvent être admissibles à faire un choix conjoint dans la règle du « ratio de groupe » pour une année d’imposition, ce qui pourrait leur permettre de déduire les intérêts nets et les frais de financement supérieurs à ceux permis en vertu de la règle générale. Les avantages de la règle du ratio de groupe ne seront généralement disponibles que si le ratio de la charge d’intérêts totale sans lien de dépendance d’un groupe à son BAIIA comptable total dépasse le ratio fixe, et le groupe est en mesure de le démontrer en fonction des états financiers consolidés vérifiés. En vertu de la règle du ratio de groupe, le groupe détermine le montant maximal des intérêts et des frais de financement que les membres du groupe consolidé sont collectivement autorisés à déduire, puis répartit le montant entre les membres canadiens du groupe, permettant ainsi d’attribuer la capacité de déduction aux contribuables qui en ont le plus besoin.
La règle du ratio de groupe permet aux entités de groupes qui sont fortement endettées avec une dette extérieure pour de véritables raisons commerciales de déduire les intérêts nets et les frais de financement supérieurs au ratio fixe. L’exigence d’états financiers vérifiés limitera probablement considérablement le nombre de groupes qui pourraient bénéficier de la règle.
Le plafond de l’EIFE, s’il est adopté, représente un changement fondamental au régime actuel de déductibilité des intérêts pour les entreprises canadiennes. Les nouvelles règles peuvent avoir une incidence sur un grand nombre d’entités publiques et privées canadiennes, même si leur dette est sans lien de dépendance. Les contribuables devraient se demander s’ils pourraient être touchés négativement par la limite eife, et si des possibilités de planification sont disponibles pour réduire cet impact négatif. Les entreprises et les investisseurs qui ont des entreprises canadiennes existantes et ceux qui planifient de nouvelles entreprises devraient analyser de façon critique si les déductions d’intérêts qu’ils ont modélisées comme étant disponibles pourraient être refusées si le plafond EIFE entre en vigueur l’année prochaine. Les nouvelles règles pourraient faire en sorte que les projets deviennent imposables en espèces plus tôt que prévu. De plus, les ratios financiers calculés à l’aide des impôts payés plutôt que des impôts courus peuvent également être touchés.
Les règles de mise en œuvre de la limite eife sont parmi les plus complexes de la Loi, couvrant 27 pages d’avant-projet de loi et comprenant diverses dispositions anti-évitement. Les règles sont sujettes à révision, car le gouvernement a invité les contribuables à fournir des commentaires sur les propositions provisoires avec une date limite de soumission du 5 mai 2022.
Les membres des groupes Bennett Jones Tax and Financial Services sont disponibles pour discuter des répercussions futures de la limite EIFE sur votre entreprise ou investissement canadien ou pour vous aider à rédiger une soumission au gouvernement canadien.