La Loi sur les valeurs mobilières permet la divulgation de renseignements obtenus dans le le le cas d’enquêtes de la CVMO sans préavis aux personnes touchées

15 juillet 2013

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Le 21 juin 2013, des modifications à la Loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario (la Loi) contenues dans le projet de loi 65, la Loi de 2013 sur un Ontario prospère et équitable (mesures budgétaires), sont entrée en vigueur.  Certaines des modifications peuvent porter atteinte aux droits des personnes faisant l’objet d’une enquête par le personnel de la Commission de s’opposer à la divulgation de renseignements obtenus à d’autres organismes de réglementation ou d’application de la loi.

Enquêtes en vertu de la Loi et divulgation de renseignements obtenus

Le régime d’enquête prévu à la partie VI de la Loi confère à la Commission le pouvoir d’exiger des témoignages et la production de documents de toute personne ou entreprise assujettie à la Loi, mais il impose également des exigences strictes en matière de confidentialité.

À cet égard, la Loi prévoit que tout renseignement ou témoignage obtenu dans le cadre d’une enquête est à l’usage exclusif de la Commission ou de tout autre organisme de réglementation précisé dans une ordonnance d’enquête et ne peut être divulgué que dans la mesure permise par l’article 17. En vertu du paragraphe 17(1), des éléments de preuve contraindants peuvent être divulgués à toute personne ou société lorsque le Conseil estime qu’il serait dans l’intérêt public de rendre une ordonnance autorisant la divulgation.

Des décisions antérieures relatives aux droits de divulgation énoncés à l’article 17 de la Loi ont tenu compte du sens à attribuer au terme « intérêt public ». Ces décisions indiquent que l’intérêt public devrait être interprété dans le contexte du régime d’enquête de la Loi et qu’il devrait donc chercher à « permettre à la Commission de mener des enquêtes équitables et efficaces et de donner aux personnes faisant l’objet d’une enquête l’assurance que les enquêtes seront menées avec les garanties qui s’y prêtent ». 1 La Cour suprême du Canada a également statué qu’en rendant une ordonnance de divulgation en vertu de l’article 17, la Commission a l’obligation de protéger les intérêts et les confidences de la personne faisant l’objet d’une enquête en matière de protection de la vie privée. Il doit trouver un équilibre entre l’intérêt de la divulgation des renseignements obtenus pour atteindre ses objectifs d’enquête et la protection des intérêts de confidentialité de l’enquête. 2

Modifications aux dispositions sur la divulgation

Avant les récentes modifications, en plus de l’exigence selon laquelle la divulgation doit être dans l’intérêt public, aucune ordonnance de divulgation en vertu de l’article 17 ne pouvait être rendue à moins qu’un avis et une occasion d’être entendus n’ont été donnés aux personnes et aux sociétés nommées par le Conseil ou qui ont fourni les témoignages ou les renseignements pertinents. Les modifications apportées à l’article 17 de la Loi offrent au Conseil un moyen de contourner l’exigence d’avis s’il est d’avis que les circonstances le justifient.

Malgré l’obligation de donner un avis et la possibilité d’être entendues aux personnes touchées, le paragraphe ajouté par les modifications (par. 17(2.1)) permet à la Commission de rendre une ordonnance autorisant la divulgation de tout renseignement ou document obtenu en vertu de son régime d’enquête à d’autres autorités gouvernementales, réglementaires ou d’application de la loi, sans donner aux personnes touchées un avis ou la possibilité d’être entendues.3 Le Conseil peut le faire dans la mesure où il estime que cela serait dans l’intérêt public. Compte tenu de la jurisprudence concernant la compétence de l’intérêt public de la Commission dans le contexte de la divulgation en particulier, l’un des objectifs importants à prendre en considération comprendra la coopération internationale dans l’application des lois sur les valeurs mobilières. La Commission devrait, dans la mesure du possible, se conformer aux principes de courtoisie et aider d’autres entités de réglementation ou d’application de la loi en divulguant les renseignements pertinents obtenus dans le cadre de ses enquêtes. 4

Par conséquent, le législateur a apparemment prévu, par l’entremise des modifications, ce qui suit. En équilibrant l’efficacité du processus d’enquête et les droits des personnes faisant l’objet d’une enquête à leur vie privée et à leurs confidences, il est à la discrétion de la Commission de déterminer que des poursuites nationales efficaces à l’égard d’une conduite qui a une incidence négative sur les marchés financiers, ou une coopération internationale efficace dans l’application des lois sur les valeurs mobilières, peuvent l’emporter sur les droits normaux à la procédure et à la vie privée des personnes faisant l’objet d’une enquête. Si la Commission est d’avis que le fait d’aviser ou d’avoir la possibilité d’être entendues aux personnes faisant l’objet d’une enquête peut compromettre ou contrecarrer les efforts d’enquête des autorités nationales ou étrangères en matière de réglementation ou d’application de la loi, elle peut s’appuyer sur sa compétence en matière d’intérêt public pour contourner les exigences en matière d’avis visant à protéger les intérêts de la personne faisant l’objet de l’enquête en matière de protection de la vie privée.

Effets possibles des modifications

Comme l’indique clairement le libellé de la disposition, les modifications apportées à l’article 17 élargissent considérablement les pouvoirs de divulgation du Conseil. Elles donnent à la Commission le pouvoir de communiquer des renseignements et des documents potentiellement inculpants à diverses entités nationales et étrangères sans donner aux personnes touchées l’occasion de contester la divulgation.

Historiquement, les tribunaux sont intervenus dans des situations où ils ont déterminé que la Commission avait adopté une approche trop libérale à l’égard de sa compétence en matière d’intérêt public. Ce droit d’interjeter appel devant les tribunaux rassure quelque peu les personnes faisant l’objet d’une enquête en vertu de la Loi. Toutefois, lorsqu’une ordonnance est rendue en vertu du nouveau paragraphe 17(2.1), il est peu probable qu’une personne ou une entreprise touchée par la divulgation secrète des documents d’enquête soit en mesure d’interjeter appel devant un tribunal pour empêcher la divulgation. Cette personne ou cette entreprise ne serait probablement pas au courant que la divulgation a eu lieu avant qu’il ne soit trop tard, voire jamais. La nature même de ce nouveau pouvoir étendu accordé à la Commission peut effectivement vider de son sens les capacités de surveillance de la cour dans les circonstances.

Les modifications apportées à la Loi semblent donc indiquer que le législateur cherche à faire pencher la balance en faveur d’enquêtes et de poursuites efficaces à l’échelle nationale et sans frontières et de poursuites en cas de comportement qui a une incidence négative sur les marchés financiers , peut-être au détriment des droits à la vie privée et à la confidentialité des personnes faisant l’objet d’une enquête. Seul le temps nous dira si ce sera l’effet réel de ces amendements.

Notes

  1. in the Matters of X and A Co., An Application by Y under section 17(1) of the Act, Commission des valeurs mobilières de l’Ontario, Motifs publiés le 8 janvier 2007 au numéro 28.
  2. Deloitte &Touche S.E.N.C.R.L., s.r.l. c. Commission des valeurs mobilières de l’Ontario, [2003] 2 R.C.S.S.R.L. 713, au numéro 29.
  3. Il est à noter qu’en vertu du paragraphe 17(3) de la Loi, le témoignage forcé ne peut être divulgué qu’à un membre d’un corps policier ou à une personne responsable de l’application du droit criminel de toute juridiction avec le consentement de la personne de qui le témoignage a été obtenu. Cette exigence de consentement dans le contexte du témoignage forcé demeure inchangée avec les récentes modifications.
  4. Dans l’affaire X Inc., Commission des valeurs mobilières de l’Ontario, Reasons publie les numéros 14 et 38 du 25 mars 2010, aux numéros 14 et 38.

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