La Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a récemment publié des directives sur l’applicabilité de certaines règles américaines en matière de procurations aux conseils de vote donnés par des agences de conseil en vote, telles que ISS et Glass Lewis. Cette initiative devrait intéresser les émetteurs publics canadiens, car les directives de la SEC pourraient entraîner un examen plus approfondi au Canada de ces organisations très influentes, mais en grande partie non réglementées, et de leur rôle sur les marchés financiers canadiens.
Les agences de conseil en vote occupent un rôle influent sur les marchés financiers du Canada. Entre autres choses, ils font progresser les politiques auto-élaborées sur les meilleures pratiques en matière de gouvernance d’entreprise. De plus, certaines agences de conseil en vote élaborent des modèles exclusifs d’évaluation de la rémunération des cadres supérieurs. Ces politiques et modèles s’appliquent généralement aux émetteurs publics canadiens et font en sorte que les agences de conseil en vote émettent des recommandations de vote sur diverses questions, y compris l’élection des administrateurs, la rémunération de la haute direction, les transactions importantes et d’autres questions de gouvernance d’entreprise présentées aux actionnaires. De nombreux investisseurs institutionnels fondent leurs décisions de vote en tout ou en partie sur de telles recommandations.
Bien que les politiques des agences de conseil en vote soient divulguées publiquement, toutes les formules et tous les détails ne sont pas publiés. Par conséquent, il n’est pas toujours possible pour les émetteurs d’en arriver à une conclusion prédictive sur la recommandation de vote qu’une société de conseil en vote peut publier sur une question particulière. Toutefois, certaines agences de sollicitation de procurations offrent des services d’évaluation des procurations moyennant des frais, ce qui permet aux émetteurs de retenir les services de la société de conseil en vote pour examiner les questions de rémunération ou de gouvernance proposées par la haute direction.
Les directives de la SEC traitent spécifiquement de la question de savoir si les recommandations de vote émises par les agences de conseil en vote constituent une « sollicitation » en vertu de l’article 12 de la Loi sur les bourses de valeurs des États-Unis de 1934 (Exchange Act).
La SEC a déclaré que les règles fédérales américaines sur les procurations s’appliquent à toute personne cherchant à influencer le vote des procurations par les actionnaires, que la personne elle-même demande ou non l’autorisation d’agir comme mandataire. En s’appuyant sur ce concept, les agences de conseil en vote peuvent devenir assujetties aux règles de sollicitation de procurations, car elles fournissent des recommandations susceptibles d’entraîner l’approvisionnement, la retenue ou la révocation d’une procuration.
Par conséquent, les directives de la SEC précisent que les conseils des agences de conseil en vote sont soumis à la règle 14a-9 de l’Exchange Act (disposition anti-fraude), qui interdit à toute sollicitation de contenir des déclarations fausses ou trompeuses d’un fait important. De plus, tout fait important nécessaire pour que les déclarations qui s’y trouvent ne soient pas fausses ou trompeuses doit également être divulgué. Par conséquent, les directives de la SEC prévoient qu’une société de conseil en vote peut avoir besoin de divulguer ce qui suit pour éviter d’être hors-jeu Règle 14-a9:
La SEC a également fourni des directives concernant les responsabilités des conseillers en placement (conseillers) lorsqu’ils conservent et comptent sur une société de conseil en vote. Entre autres choses, les conseillers devraient examiner comment les agences de conseil en vote tiennent compte des caractéristiques uniques de l’émetteur, de son secteur d’activité, de son historique et de son rendement financier, en reconnaissant qu’une approche « universelle » à l’égard de questions complexes qui font l’objet d’un vote des actionnaires est préoccupante. La SEC a également identifié des préoccupations relatives à l’engagement des émetteurs et à la nécessité de s’assurer que les agences de conseil en vote disposent de renseignements complets et exacts et prennent des mesures pour corriger toute lacune importante identifiée dans l’analyse d’une société.
Les directives de la SEC sont remarquables en ce qu’elles pourraient, en ce qui concerne les émetteurs américains, accroître la transparence des agences de conseil en vote par rapport à leurs méthodologies et analyses. Cela pourrait également encourager ces entreprises à collaborer avec les émetteurs et réduire leur dépendance à l’égard de politiques « universelles » qui ne tiennent pas compte des caractéristiques uniques de l’émetteur ou de l’opération.
À ce jour, les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières n’ont publié que des directives non normatives et des pratiques recommandées pour les agences de conseil en vote. Il reste à voir si les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières emboîteront le pas à la SEC. Compte tenu de l’influence croissante que ces entités privées à but lucratif ont sur les marchés financiers du Canada, il est justifié de tenir compte à jour des points de vue des participants au marché sur la formulation de politiques par les agences de conseil en vote et les questions connexes. Les participants au marché assujettis aux politiques des agences de conseil en vote peuvent être heureux d’avoir l’occasion d’offrir d’autres commentaires sur la gouvernance des agences de conseil en vote, leurs activités de formulation de politiques et l’opportunité d’un engagement accru des émetteurs.