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La Cour supérieure de l’Ontario accorde des dommages-intérêts pour discrimination fondée sur l’état familial

30 avril 2015

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Écrit par Ranjan K Agarwal

La décision rendue par le juge Healy en janvier 2015 dans Patridge v Botony Dental Corporation figure probablement sur de nombreuses listes de décisions en matière de droit des droits de la personne déjà décidées cette année. En plus d’accorder des dommages-intérêts en vertu du Code des droits de la personne, la décision du juge Healy traite du critère de la discrimination fondée sur l’état familial (la première fois qu’un tribunal de l’Ontario l’a fait).

Lee Partridge a travaillé comme chef de bureau chez Botony Dental Corporation. Pendant un congé de maternité, Botony a informé Patridge qu’elle retournerait au travail en tant qu’hygiéniste dentaire, à partir de la plupart des jours à 9 heures du matin. Partridge a insisté pour qu’elle soit réintégrée comme directrice de bureau. Partridge a également allégué que Botony savait que Patridge ne pouvait pas commencer à travailler à 9 heures du matin en raison des arrangements de garde d’enfants. Botony finit par congédier Partridge.

Partridge a intenté une poursuite pour congédiement injustifié et violation du Code des droits de la personne. Le tribunal lui a accordé 12 mois de salaire tenant lieu de préavis. Mais, surtout, il lui a également accordé des dommages-intérêts de 20 000 $ pour discrimination fondée sur l’état familial. Cette affaire n’est que la deuxième décision rendue par la Cour supérieure lorsqu’un tribunal a exercé sa compétence en vertu de section 46.1 du Code pour accorder des dommages-intérêts pour violation du Code, la première étant Wilson c. Solis Mexican Foods Inc.

De plus, il est important de noter que le juge Healy s’est engagé dans le débat en cours sur le critère de discrimination fondée sur l’état familial. Dans l’affaire Johnstone c. Canada (Services frontaliers), la Cour d’appel fédérale a statué qu’un demandeur doit démontrer ce qui suit pour prouver prima facie la discrimination découlant des obligations en matière de garde d’enfants :

  • qu’un enfant est sous sa garde et sa supervision
  • que l’obligation de garde d’enfants en cause engage la responsabilité légale de la personne à l’égard de cet enfant, par opposition à un choix personnel
  • qu’il a fait des efforts raisonnables pour s’acquitter de ces obligations en matière de garde d’enfants au moyen de solutions de rechange raisonnables, et qu’aucune solution de rechange de ce genre n’est raisonnablement accessible
  • que la règle contestée en milieu de travail interfère d’une manière qui est plus que triviale ou insignifiante dans l’exécution de l’obligation de garde d’enfants

L’employeur peut réfuter une conclusion de discrimination à première vue en démontrant que la politique du milieu de travail (en l’espèce, les heures de travail) est une exigence professionnelle justifiée.

En Ontario, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario a appliqué un critère différent pour la discrimination fondée sur l’état familial dans Devaney v ZRV Holdings Limited (bien qu’il s’agisse d’obligations en matière de soins aux personnes âgées). Ce critère, qui est propre aux faits, a été décrit comme suit : le demandeur doit établir que les exigences de présence des intimés ont eu une incidence négative sur le demandeur en raison des absences qui ont été requises en raison des responsabilités du demandeur en tant que principal dispensateur de soins de sa mère. Le Tribunal, à l’inditation de la Cour d’appel fédérale, a souligné qu’il n’y a pas de discrimination si l’obligation de soins est un choix. Le Tribunal et la Cour d’appel fédérale ont rejeté le critère plus restrictif applicable en Colombie-Britannique à partir de Health Sciences Assoc. of B.C. v. Campbell River and North Island Transition Society : lorsqu’un changement dans une condition d’emploi imposée par un employeur entraîne une interférence grave avec un devoir ou une obligation parentale ou autre obligation familiale importante de l’employé. Le juge Healy a appliqué l’arrêt Johnstone, sans discuter ni du critère de l’affaire Devaney ni du critère de la Colombie-Britannique.

Dans la mesure où il y a un débat en droit ontarien sur le bon critère, cette décision semble trancher la question. Bien que le Tribunal n’ait pas appliqué l’arrêt Partridge, il semble probable que de nombreux membres du Tribunal se sentiront liés par une décision judiciaire appliquant le Code. À ce titre, les employeurs doivent être conscients que si un employé a des obligations en matière de garde d’enfants et a fait des efforts raisonnables mais, en fin de compte, infructueux pour trouver d’autres solutions, l’employeur peut être obligé de répondre aux besoins de l’employé, en particulier en ce qui concerne les heures de travail.

Cela démontre également que les tribunaux sont de plus en plus disposés à exercer le nouveau pouvoir que leur a conclu le Code d’accorder des dommages-intérêts aux droits de la personne. À ce titre, les employeurs doivent savoir qu’ils peuvent être tenus responsables de dommages-intérêts généraux en plus de l’indemnisation pour congédiement injustifié si la discrimination est un facteur dans le congédiement de l’employé.

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