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Naviguer dans l’incertitude : restructuration et insolvabilité dans le secteur du cannabis

13 janvier 2020

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Écrit par Alexander Payne, Shaan Tolani and Gavin Finlayson

Au fur et à mesure que l’industrie du cannabis a mûri, l’enthousiasme des investisseurs a été tempéré par des résultats financiers qui ont été en deçà des chiffres projetés. L’industrie continue de faire face à des obstacles réglementaires liés à la vente au détail, en particulier en Ontario. Par conséquent, de nombreuses entreprises de cannabis sont maintenant confrontées à des contraintes de liquidité et pourraient devoir commencer à envisager des solutions de rechange en matière d’insolvabilité et de restructuration. Cela est confirmé par le fait que des acteurs relativement importants comme AgMedica et Wayland , qui semblaient prospérer, ont récemment acquis la protection des créanciers en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). 

En tant que participants d’origine dans le domaine légal du cannabis et l’une des premières entreprises à aborder des questions spécifiques à l’industrie du cannabis dans le contexte des procédures d’insolvabilité et de restructuration, le groupe Bennett Jones Cannabis group a développé un vaste réseau de contacts à travers le Canada et au-delà qui peut aider les entreprises de cannabis en difficulté à se procurer du refinancement, et, où approprié, aider les entreprises de cannabis et les créanciers à naviguer dans les défis uniques – mais non insurmontables – auxquels les participants de l’industrie sont confrontés dans le contexte de la procédure d’insolvabilité et de restructuration.

Étant donné que le Parlement a conçu la Loi sur le cannabis du point de vue de la santé et de la sécurité publiques, il existe des lacunes en ce qui concerne les procédures d’insolvabilité. Santé Canada est conscient de la nécessité d’une modification réglementaire, qui a généralement suivi l’expérience du marché dans d’autres industries émergentes. Cependant, alors que les difficultés de croissance sont traitées, certaines entreprises, et les créanciers imprudents, peuvent se trouver mal préparés aux défis des procédures d’insolvabilité et de restructuration. 

Les administrateurs doivent identifier les premiers signes de difficultés financières et comprendre leurs obligations envers les autres parties prenantes de l’entreprise alors qu’une entreprise de cannabis est sur le point d’être insolvable. Ils devraient consulter des conseillers professionnels pour comprendre et planifier les solutions de rechange à la restructuration, d’autant plus qu’il existe des considérations et des incertitudes propres au cannabis qui peuvent compliquer un processus de restructuration et d’insolvabilité déjà complexe. Les créanciers doivent être conscients des aspects uniques de l’industrie qui peuvent avoir une incidence sur les résultats, ainsi que des stratégies visant à protéger la valeur de leur investissement à la lumière de ces questions propres à l’industrie. Ces questions propres à l’industrie comprennent :

  1. les restrictions à la vente ou au transfert d’une licence de cannabis;  
  2. des exigences strictes en matière d’habilitation de sécurité pour les personnes qui exercent, ou qui sont en mesure d’exercer, un contrôle sur une licence de cannabis ou un titulaire de licence de cannabis d’entreprise;
  3. l’incertitude quant au mécanisme et à la disponibilité des acheteurs lors de la vente des stocks;  
  4. l’instabilité de l’évaluation marchande des produits du cannabis; et
  5. la réticence des officiers de justice à prendre possession des stocks et des biens de cannabis.

Les entreprises de cannabis et les créanciers qui reconnaissent ces problèmes et qui demandent des conseils professionnels pour les résoudre adéquatement seront mieux placés pour maintenir la valeur pour les parties prenantes. 

Limites relatives à la vente ou au transfert de licences de cannabis

Les licences de cannabis, qui sont délivrées par Santé Canada, sont essentielles pour tous les participants au marché, leur permettant de s’engager dans toutes leurs opérations de base, y compris la production, l’analyse, la culture et / ou la vente de cannabis.

Malgré leur valeur autonome et leur nécessité pour les opérations, il existe des obstacles potentiels à la réalisation de cette valeur. Bien que Santé Canada ait le pouvoir d’approuver ou de rejeter toute attribution d’une licence, le processus – et peut-être plus important encore le calendrier – lié à une telle vente ou à un tel transfert n’est pas très clair.

Les limites imposées à la vente ou au transfert de licences de cannabis ont également créé une certaine incertitude lorsqu’on cherche à utiliser une licence de cannabis comme garantie. Les créanciers peuvent ne pas être disposés à accepter une licence comme garantie lorsqu’il n’est pas certain qu’ils puissent effectivement prendre une sûreté sur une licence et/ou réaliser correctement leur sûreté pour effectuer le transfert d’une licence lorsqu’un débiteur fait défaut. 

Exigences strictes en matière d’habilitation de sécurité

La Loi sur le cannabis et le Règlement sur le cannabis exigent que toute personne qui exerce, ou est en mesure d’exercer, un contrôle direct sur un titulaire de licence de cannabis détienne une habilitation de sécurité avant d’assumer les fonctions du poste. L’obtention d’une habilitation de sécurité en vertu de la Loi sur le cannabis a toujours été un processus lent, ce qui a entraîné un long temps d’attente. En vertu de certaines lois étatiques sur le cannabis aux États-Unis, il existe des exceptions aux exigences d’habilitation de sécurité dans le contexte d’un fiduciaire ou d’un séquestre. Cependant, la législation canadienne est muette à ce sujet, et donc en l’absence de toute exclusion expresse ou permission de Santé Canada, les officiers de justice dans les procédures d’insolvabilité peuvent être tenus de détenir une habilitation de sécurité avant d’assumer un rôle qui les obligerait à exercer un contrôle sur la licence de cannabis ou le titulaire d’une licence de cannabis de l’entreprise. Cette exigence est un autre obstacle qui peut limiter le type de procédure d’insolvabilité disponible pour les sociétés de cannabis insolvables. 

Limites sur la vente d’inventaire

Compte tenu des restrictions sur les ventes au détail et de la nécessité d’obtenir une licence pour vendre du cannabis à des fins commerciales, le marché des stocks est relativement limité. Dans le contexte d’une procédure d’insolvabilité, il existe une certaine incertitude quant à savoir si un syndic ou un séquestre peut utiliser la licence du débiteur pour liquider les stocks.

Instabilité de l’évaluation marchande des produits du cannabis

En supposant qu’un acheteur intéressé existe, il peut être complexe d’évaluer le cannabis à un moment donné, compte tenu de sa nature en tant que matière organique. Le nombre de cycles de croissance, les rendements par plante, les prix du marché, le coût par gramme et d’autres facteurs peuvent également créer une variabilité dans l’évaluation du marché des produits du cannabis. Comme la juste valeur d’une plante n’est pas linéaire par sa croissance, il peut y avoir des défis liés à l’évaluation (voir l’article de BDO Évaluation des actifs biologiques dans l’industrie du cannabis), pendant les ventes d’actifs pendant que les procédures d’insolvabilité sont en cours.

Réticence des officiers de justice à prendre possession

Les officiers de justice ont fait preuve d’aversion à l’égard de l’exploitation ou d’une participation active importante aux opérations liées au cannabis, exprimant des préoccupations quant aux ramifications potentielles en ce qui concerne les voyages internationaux et d’autres activités en raison du statut juridique du cannabis dans d’autres juridictions, notamment aux États-Unis. De plus, les questions susmentionnées entourant la vente et le transfert de licences et les exigences en matière d’habilitation de sécurité peuvent limiter la capacité pratique des officiers de justice de exercer la possession et le contrôle d’une entreprise de cannabis.

Cette question n’est pas insurmontable et peut être atténuée en grande partie par des modifications prudentes aux ordonnances judiciaires qui habilitent les officiers de justice dans les procédures d’insolvabilité, comme on le voit dans le Curative Cannabis receivership et dans les deux Wayland et AgMedica Dépôts en vertu de la LACC.  

Voie à suivre

Malgré les récentes contraintes de liquidité et la correction du marché, l’industrie canadienne du cannabis continue d’avoir un potentiel important. Le Canada est le premier pays du G20 à légaliser le cannabis à l’échelle nationale et a l’occasion de devenir un chef de file mondial dans l’industrie du cannabis. De plus, l’annonce récente que le système de loterie de l’Ontario pour les magasins de détail sera abandonné et que le plafond des licences de magasins de détail sera supprimé indique que la province la plus peuplée du Canada est consciente de l’incidence des obstacles réglementaires de la vente au détail sur l’industrie.

Bennett Jones a acquis une expertise considérable pour aborder les questions uniques propres aux procédures d’insolvabilité et de restructuration de l’industrie du cannabis. Pour obtenir des conseils, veuillez contacter Alexander Payne.

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