Quand les ententes conclues dans le cadre du processus d’approbation de l’aménagement du territoire prolongent-elles ce processus et peuvent-elles donc être modifiées au moyen d’un processus futur, et quand s’apparentent-elles davantage à des contrats commerciaux qui seront appliqués en tant que tels ?
Essentiellement, c’est la question soulevée dans la décision de la Cour supérieure de justice de l’Ontario dans l’affaire Cedarhill Golf Enterprises Inc. c. La Ville d’Ottawa (la Ville) (le 2 avril 2024).
Cedarhill Golf Enterprises Inc. (Cedarhill) a demandé un jugement déclaratoire à la Cour supérieure de justice, selon lequel l’annexe Y5 (Y5) d’une entente de lotissement (l’entente) enregistrée sur le titre de propriété de sa propriété (les terres) était ultra vires, invalide et inapplicable. Plus précisément, Cedarhill s’opposait à un mandat en Y5 qui exigeait l’exploitation continue d’un terrain de golf sur les terres à perpétuité. Le terrain de golf actuellement en exploitation sur les terres n’est plus financièrement viable. Cedarhill avait fait valoir les points suivants :
Cedpar, l’ancien propriétaire des terres, avait conclu l’entente de lotissement en 1980. Il est important de noter qu’au moment de la mise en place de l’entente de lotissement, Cedpar a accepté de maintenir le terrain de golf à perpétuité en échange de certains droits d’aménagement.
L’Entente garantissait expressément l’exploitation continue du terrain de golf à perpétuité, à l’exception d’un mécanisme pour lequel le mandat du terrain de golf pourrait être retiré ou modifié. En bref, l’entente prévoyait à la Ville des droits d’exploitation et d’entretien du terrain de golf en cas de défaut du propriétaire. Si la Ville exerce son permis d’exploitation et d’entretien du terrain de golf et détermine que les activités de golf ne sont plus commercialement viables, la Ville peut alors modifier l’utilisation des terrains, à condition que cela (1) maintienne les terres en question en tant qu’espaces ouverts (tout en respectant le zonage existant) et ; 2° donner un avis écrit au propriétaire et à tout créancier hypothécaire. L’entente prévoyait également que la Ville et le propriétaire pourraient convenir de modifier l’exigence de s’y conformer.
La Cour divisionnaire s’est penchée sur cinq questions précises liées au caractère exécutoire de l’Accord.
Cedarhill a soutenu que l’Entente est une tentative ultra vires de la Ville de contourner la limite sur la quantité de terrain qui peut être consacrée à un parc public au moyen d’une entente de lotissement. La Cour n’a pas jugé fondé cet argument, car la Loi sur l’aménagement du territoire, L.R.O. 1970, ch. 349, autorisaient expressément les municipalités à conclure des ententes comme condition à l’approbation d’un projet de plan. Bien que la loi établisse une quantité maximale de parcs qui peut être exigée d’un propriétaire, la Cour a statué qu’elle n’empêchait pas les parties de conclure une entente pour fournir plus que le montant maximal requis.
Il semble avoir été important pour la Cour que les promoteurs ne soient pas sans recours dans des circonstances où ils croient que les municipalités vont trop loin ou imposent des conditions déraisonnables, car ils peuvent interjeter appel auprès de l’OLT à tout moment avant que l’ébauche du plan ne soit finalement approuvé , ce qui suggère que le défaut d’utiliser les droits d’appel appuie l’idée que l’accord de lotissement était plus proche d’un contrat commercial plutôt que de l’imposition par le gouvernement.
La Cour a également affirmé que les ententes de lotissement sont d’une importance fondamentale pour le processus d’aménagement du territoire de l’Ontario et constituent un mécanisme exécutoire pour assurer le respect des conditions d’approbation après l’enregistrement d’un plan de lotissement.
Cedarhill a soutenu que les ententes de lotissement sont des instruments de planification plutôt que des contrats et qu’à ce titre, elles devraient demeurer ouvertes à des changements dans les lois et les politiques. La Cour n’était pas d’accord. Cedarhill n’avait cité aucune autorité stipulant que les plans de lotissement devraient être ouverts à des changements dans les lois et les politiques. De plus, les tribunaux ont conclu à maintes reprises qu’un accord de lotissement est un contrat et doit être interprété selon les principes normaux d’interprétation contractuelle.
Cedarhill a soutenu que, parce que le maintien du terrain de golf ouvert était une obligation positive, le mandat n’est pas exécutoire contre le demandeur en tant que successeur en titre des terres. Encore une fois, la Cour n’était pas d’accord. La Cour a déclaré que la nature des ententes de lotissement est telle que la plupart sinon la totalité des clauses restrictives sont des obligations positives et que
Cedarhill a soutenu que tout intérêt conditionnel dans un terrain créé par une entente de lotissement en 1980 doit avoir été acquis en 2001, sinon les intérêts de la Ville sont nuls en raison de l’éloignement.
La Cour a conclu que la règle interdisant les perpétuités ne s’était pas applicable en l’espèce, car la Ville n’avait le droit d’entrer sur les terrains du terrain de golf qu’à titre de titulaire de permis. Le droit de la Ville était purement contractuel et ne créait pas d’intérêt conditionnel sur le terrain.
Cedarhill a soutenu que l’application des conditions de Y5 constituerait une expropriation de facto à laquelle Cedarhill a droit à une indemnisation en vertu de la Loi sur les expropriations. La requérante a soutenu que Y5 laisserait Cedarhill avec seulement l’utilisation théorique du terrain et le priverait de toute valeur économique. La Cour s’est concentrée sur la nature de l'« expropriation » dans le Expropriations Act, R.S.O. 1990, c. E.26, qui exige la prise de terre sans le consentement du propriétaire. En l’espèce, le consentement et l’accord de Cedpar (en acceptant la condition du lotissement et en concluant une entente pour garantir cette condition) ont été jugés incompatibles avec le concept selon lequel le terrain a été pris sans consentement.
Bien que la Cour ait finalement conclu que l’Accord, y compris Y5, était valide, elle a déterminé qu’au lieu de rejeter la demande, elle ajournerait la demande pour une période de 120 jours tout en encourageant les parties à demander la médiation en vue de parvenir à un règlement conforme aux dispositions de l’Accord.
À la date de cet affichage, aucune autorisation d’appel n’a été demandée.
Cette affaire sert de plusieurs avertissements aux propriétaires de terres qui cherchent à obtenir des approbations d’aménagement et aux acheteurs proposés de terrains :
Si cette décision n’est pas annulée, les propriétaires fonciers et ceux qui cherchent à acheter des terres devront examiner attentivement les accords enregistrés contre leur titre afin de comprendre le potentiel (ou l’absence de celui-ci) de l’actif sous-jacent.